On ne peut plus prétendre que la politique de la race, élément constitutif du pouvoir des sociétés capitalistes blanches, n’existe pas et n’a pas d’innombrables conséquences pour toutes les personnes afro-descendantes et issues ou descendantes de pays colonisés. Elle a non seulement mobilisé l’ensemble des disciplines scientifiques mais elle a imposé à l’ensemble du monde la référence à la Modernité euro-centrée au point de nier, voire de détruire l’apport ou la référence à toute autre culture.
Utilisée pour la colonisation du monde, elle s’est traduite par l’extermination des Indigènes des Amériques et de la Caraïbe, la traite négrière transatlantique, la mise en esclavage de plus de 12 millions d’Africain.e .s et la pérennisation d’un système organisé autour du pillage des ressources naturelles et du vol des terres acquises par le crime. Ainsi ont été posées les premières pierres du capitalisme et de la mondialisation.
Actuellement, l’ordre mondial capitaliste libéral est toujours habité par des structures coloniales du pouvoir, que l’on retrouve aussi bien dans les relations internationales de domination néo coloniale et impérialiste que dans la gestion des corps noirs, arabes, tsiganes, asiatiques et de celles et ceux qui vivent dans des quartiers de relégation sociale et raciale.
Le racisme structurel fait partie intégrante du système capitaliste ; il est au fondement de la prospérité relative de sociétés occidentales construites sur un rapport colonial et impérialiste.
Ainsi le racisme structurel, devenu une norme impensée, rend invisibles et silencées les personnes racisées et racialisées d’en bas. Elles sont davantage exploitées, victimes de négrophobie, d’islamophobie, de rromophobie, considérées ennemis de l’intérieur, criminalisées et soumises à un droit d’exception.
Les racisé.e.s n’ont pas attendu la modernité pour se révolter (rappelons le marronnage et la république d’Haïti). Mais c’est grâce à leurs luttes récentes et généralisées dans les métropoles capitalistes notamment, qu’a pu être mis en lumière le caractère structurel du racisme d’État contre lequel les bons sentiments du racisme moral, souvent empreints de paternalisme, ne peuvent rien, si ce n’est déposséder les corps racisés et racialisés.
La lutte des racisé.e.s a fait entrer dans l’espace public l’impérieuse nécessité de poser cette lutte en termes d’antiracisme politique porté par les racisé.e.s elles-eux-mêmes ; c’est dans cet espace d’autonomie et d’émancipation que doit s’exprimer la solidarité politique de toutes celles et ceux qui sont ou qui veulent être aux côtés des racisé.e.s : les anticapitalistes, les syndicats, les partis, l’ensemble des mouvements sociaux qu’ils soient locaux ou internationaux.
Cette lutte ne peut se mener sans celle contre les politiques capitalistes libérales ; continuer à mener des luttes contre le racisme, détachées de la critique des mécanismes de l’exploitation capitaliste et inversement, participe à la perpétuation du racisme structurel. On ne peut dénoncer l’un sans dénoncer l’autre.
Le forum pour un antiracisme politique appelle toutes celles et ceux qui luttent contre le capitalisme et contre le racisme sous toutes leurs formes mortifères à dénoncer et à combattre, en agissant de manière systématique, l’ensemble des politiques mises en place par la colonialité du pouvoir dont une des armes est le racisme structurel mis en œuvre dans les politiques économiques, sociales, culturelles et environnementales.
Le forum pour un antiracisme politique appelle à se mobiliser pour un processus politique des réparations dues pour les crimes contre l’humanité et les génocides initiés à partir de 1492, pour le pillage des ressources naturelles, pour le vol des terres ; à se mobiliser pour une réelle refonte de la politique foncière dans les actuelles colonies françaises et pour mettre fin à l’urbanisme néocolonial qui ghettoïse des immigrés et leurs descendants.
Le forum pour un antiracisme politique appelle à la condamnation de ce contrôle impérialiste des frontières se traduisant par l’assassinat programmé de dizaines de milliers de migrantes et migrants. Les politiques systématiques et planifiées d’externalisation de l’Union Européenne dans les pays du sud sont responsables de crimes contre l’humanité, voire de génocide, exigent une réaction unanime et déterminée.
À ce prix seulement cesseront les pratiques du racisme d’État : les violences policières, la relégation des corps racisés dans les zones périphériques du pouvoir, les discriminations racistes institutionnelles, les politiques meurtrières à l’égard des migrants-migrantes. Ce n’est que tous-toutes ensemble que nous pourrons imposer un rapport de forces pour mettre fin à un système structuré par le racisme et le capitalisme.
Source : UJFP
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