Par Maria Poumier
Après les manifestations et contre-manifestations qui ont eu lieu cette semaine à Cuba, a-t-on des raisons de craindre une intervention militaire US, déjà annoncée? Il ne fait aucun doute que la CIA est aux manettes, pour téléguider sur place une éventuelle révolution de couleur. De nombreux facteurs prouvent un intérêt spécifique du lobby israélien pour la reconquête de ce pays. Voici quelques données historiques.[1]
Cuba a toujours été terre d’émigration autant que d’immigration: constituant géographiquement la « Clé du golfe » du Mexique, l’île fut le tremplin d’Hernán Cortés pour l’invasion espagnole du Mexique, puis de toute l’Amérique. Et Cuba reste le tremplin pour sauter en Floride, légalement comme sur des embarcations de fortune. C’est à ce titre qu’en juin 1939, environ 1100 juifs ashkenazes arrivèrent à bord de trois paquebots, le cas le plus connu étant celui du Saint-Louis. Mais les États-Unis avant la deuxième guerre mondiales pratiquaient un barrage strict contre les juifs européens. C’est ainsi qu’ils ne voulaient nullement recevoir ces réfugiés, qui voulaient juste patienter à Cuba en attendant de pouvoir franchir le détroit de la Floride; ils rechignèrent à aider financièrement les passagers du Saint-Louis à payer leurs droits pour débarquer provisoirement à Cuba, et ceux-ci furent en grande majorité ramenés en Belgique. Depuis ce temps-là, certains fils de Cubains d’origine juive, et devenus citoyens américains, crient à « L’holocauste cubain« , réclamant vengeance.
De fait, Cuba fut l’un des premiers pays à refuser de voter à l’ONU en faveur de la création de l’État d’Israël, en 1947, malgré de fortes pressions, financières entre autres. Les autres pays d’Amérique latine se laissèrent convaincre.[2]
Les aspects les plus féroces de l’impérialisme US dans les années 1960 – 1980 (à partir de ce moment, le catholique Carter décida de cesser son soutien aux dictatures militaires, et de contribuer à l’instauration de gouvernements démocratiques) ont été mis en œuvre par des juifs d’origine cubaine, en fait des fils de réfugiés ashkénazes qui trouvèrent le moyen de s’installer quelques années à Cuba avant de devenir citoyens US. Otto Reich , ministre de Bush père, Luis d’Amato, auteur de la loi qui permet d’étrangler sous les sanctions tous les pays qui déplaisent à l’empire, Cuba, Libye, Iran etc, le terroriste Orlando Bosch, l’universitaire très active Ileana Ruth Bear, la représentante Ileana Roth Lehtinen, également acharnée, et bien d’autres.[3]
Rappelons que la loi Helms-Burton, promulguée en 1996 sous Bill Clinton, permettait de sanctionner toute entreprise européenne implantée à Cuba faisant des affaires mettant peu ou prou en jeu des propriétés immobilières US, expropriées par la Révolution cubaine en 1960. Elle fut mise en sommeil pendant vingt ans, puis réactivée par le président Trump en juin 2019. Elle envisage nommément de rançonner l’État cubain, à titre de dédommagement pour la perte des biens nationalisés.
L’Américain le plus célèbre pour l’étendue de son empire immobilier était le gangster juif Meyer Lanski, grand développer de casinos et de réseaux de prostitution qui relocalisa son empire à Las Vegas, fut rudement poursuivi par la justice US, se réfugia en Israël, revint blanchi aux US, où ses héritiers lui créèrent un musée. Ses restes furent accueillis en Israël, avec les plus grands honneurs.
Parmi les plus décidés à asphyxier la population cubaine en empêchant le pays de contourner l’embargo décidé en 1962, et maintenu jusqu’à aujourd’hui malgré les votes annuels de l’ONU, embargo auquel ne s’opposent plus, tous les ans que deux pays, USA et Israël, on peut citer d’autres personnalités juives acharnées aussi à dévaliser d’autres pays d’Amérique latine, en particulier l’Argentine, comme Paul Singer ou Sheldon Adelson, le roi des casinos et ami personnel de Donald Trump, disparu en janvier 2021. Israël a ses propres lois et décrets pour imposer son embargo à Cuba.
L’obstination de ces personnages s’explique par le fait que la plus grande partie du parc immobilier cubain dans les années 1950 était propriété d’ashkenazes, suite à la vague migratoire déjà mentionnée[4]. 95% des juifs quittèrent Cuba pour Miami en 1960, après la réforme foncière qui mettait fin à la spéculation immobilière. Mais la richesse immobilière juive sépharade était ancienne à Cuba, car ce sont les sucriers de Curaçao qui développèrent les plantations, à partir du XVII° siècle, et firent la richesse du pays, particulièrement après le boom du café, qui prit fin vers 1830. Ces magnats du sucre et de l’esclavage africain indissociable constituèrent une caste qui fit longtemps pression sur le gouvernement espagnol pour freiner l’abolition de l’esclavage et l’autonomie politique de la colonie, de façon comparable à la caste de békés dans les Antilles française. Né au Vénézuela, L’homme le plus riche de Cuba avant la révolution, Julio Lobo, le « roi du sucre » à Cuba, à Puerto Rico, et dans le monde entier, s’était fait bâtir un musée napoléonien, que l’on visite toujours, à La Havane. (Lobo est la traduction de Wolf, en allemand)
Après la Révolution de 1959, Cuba rompit ses relations avec Israël, en 1973. Mais cela n’empêcha pas Fidel Castro de nouer des liens personnels avec un nouveau grand propriétaire terrien et exportateur, 100% israélien: Rafi Eitan lui-même, dirigeant légendaire du Mossad.[5] L’émigration légale en direction d’Israël se mit en place dans les années 1990.[6]
Un personnage a été appréhendé puis jugé pour espionnage et mise en danger de la sécurité nationale en 2009, car il se livrait à la distribution de téléphones portables aux juifs cubains. Allan Gross fut condamné à 15 ans de prison, mais fut libéré au bout de cinq ans, en 2014, en échange de trois des « Cinq » célèbres agents cubains qui luttaient contre le terrorisme US, et croupissaient en prison depuis 1998.
Les liens privilégiés de Cuba avec Israël s’expliquent si l’on tient compte du soutien juif aux guerres d’indépendance de Cuba contre l’Espagne, de 1868 à 1898. Deux tendances cohabitaient : la tendance annexionniste, vivace et tenace en Floride, et une autre, indépendantiste et idéaliste. José Martí organisa un débarquement sur l’île Fernandina avec un chargement d’armes, qui fut un échec, mais c’est son avocat juif, Horacio Rubens, qui put récupérer légalement aux USA la cargaison, ce qui permit le débarquement, réussi, cette fois, du 24 février 1895. Par la suite, le Parti communiste cubain, fondé en 1925, comporta des cadres d’origine ashkenaze d’un désintéressement et d’un idéalisme reconnus: Fabio Grobart, Jaime Oltuski, outre des artisans et de nombreux intellectuels. Depuis longtemps, donc, il y a donc un lobby juif cubano américain annexioniste, et un autre, plus discret, défenseurau dépaprt de la souveraineté cubaine, puis devenu pro-israélien. Les deux groupes de pression fusionnent en général pour financer des films de propagande, des actions culturelles, des bourses, un minuscule musée de l’Holocauste[7] (dans la synagogue sépharade du Vedado, rénovée en 2006).
Conclusion et raisons d’espérer
Dans la conjoncture actuelle, où le pays est assiégé avec une cruauté particulière (même Alexandria Ocasio-Cortez le reconnaît!), avec un élément encore puissant parce que relativement nouveau, l’accès à facebook et à twitter, réseaux sociaux proprement envahis par les réseaux de la CIA, il est logique de penser que si une attaque militaire US n’a pas encore eu lieu, c’est parce qu’il manque un évènement déclencheur. En 1898, c’est l’explosion « providentielle » du croiseur Maine dans la baie de la Havane, immédiatement imputée à l’armée espagnole, qui avait fourni le prétexte (les enquêtes postérieures permettent de conclure que c’était un sabordage US sous faux drapeau)[8].
Mais le gouvernement cubain, totalement dépourvu de naïveté, héritier de plus d’un siècle de combats pour la souveraineté nationale, et en négociations avec le gouvernement russe pour obtenir des aides humanitaires, financières et militaires, a en outre d’autres cartes à jouer, pour retarder ou bloquer une intervention militaire US, qui aurait une énorme valeur symbolique, sans oublier les intérêts stratégiques en jeu, que la Russie ne sous-estime pas.
En effet, le Canada a toujours bravé les sanctions US, et amené à Cuba un flot nourri d’investissements immobiliers pour le tourisme, et des vagues massives de touristes. Il est probable que cette remarquable autonomie diplomatique des Canadiens, on la doive au président Trudeau, qui est réputé fils naturel de Fdel Castro lui-même, né en 1971; sa mère jouait dans ces années-là un rôle important dans la solidarité avec Cuba.
Pour ce qui est des liens avec l’Espagne, Fidel Castro avait toujours entretenu des relations privilégiées avec les gouvernements espagnols, y compris sous le franquisme, le général Franco étant originaire de Galice, comme la famille Castro. Les intérêts espagnols seraient en concurrence directe avec ceux des USA, en cas d’ingérence militaire.
La Russie et la Chine, quant à elles, ne se laisseraient pas convaincre de la légitimité d’une instauration de zone « no fly » au-dessus de Cuba, comme ils l’avaient fait, par négligence, à propos de la Libye, en 2011.
Autre solution pour les capitalistes décidés à se faire restituer ce qu’ils estiment leur pouvoir et leurs propriétés historiques « de droit divin », et à faire payer le prix de leur revanche par des « gusanos » à très courte vue qui se verront ensuite dépouillés par plus riches qu’eux : les coups d’État par fantoches locaux interposés; mais au Venezuela, Guaido n’a pas pu déloger Maduro, qui a repris la main, et gère le dialogue avec l’opposition; en Bolivie, le président Arce, disciple d’Evo Morales, a repris les rênes… Au Nicaragua, malgré l’armement massif des Contras, ce sont toujours les Sandinistes qui dirigent le pays, depuis 30 ans. Biden se réjouit de pouvoir brandir un cadavre de manifestant, qui lui sert de prétexte pour de nouvelles sanctions financières au nom du droit humanitaire (un bon échantillon de théâtre de l’absurde), »symboliques », dit-il, mais « ce n’est qu’un début », annonce-t-il lui-même…
Une chance pour Cuba: les agences de renseignement US sous-estiment toujours la capacité de riposte des peuples; en fait toute intervention US serait d’une maladresse qui réveillerait immédiatement les consciences. Mais Biden pourrait aussi choisir de laisser indéfiniment pourrir la situation, et laisser les quislings du cru faire le jeu des candidats à l’occupation militaire à moyen terme. N’oublions pas que le projet du Grand Reset comporte la ruine de tous les pays qui vivent du tourisme, sous prétexte d’écologie. Comme Paul Singer travaille à le faire pour l’Argentine depuis la crise financière de 2003, il s’agira de racheter à bas prix avec des « fonds vautour » les emprunts « pourris » des pays insolvables, puis d’imposer l’échange de « dettes contre territoires ». Il faut pour cela la coopération des élites financières locales. À suivre.
Malheureusement, au niveau de la propagande, le gouvernement cubain n’est pas parvenu à temps à contrer les tendances « woke », antipatriotiques, en vogue aux USA. La propre fille de Raul Castro, (frère par adoption de Fidel Castro, et son second), mène à la télévision d’État des campagnes pour « l’éducation sexuelle », concrètement LGBTistes, quoi qu’elle refuse d’être associée à la cinquième colonne des annexionnistes. C’est le terreau de la « sixième colonne » identifiée par Alexandre Douguine dans l’entourage du président russe, mais pas seulement là-bas…
Intellectuels et artistes, toujours à l’avant-garde de la jérémiade, ne sont pas les seuls à être tentés par le rôle. Le milieu du rap, avec ses textes remplis de bravades, concentre la créativité populaire, mais aussi la colère. La musique est la véritable religion cimentant toute la société cubaine, et garde une énorme capacité de mobilisation.
La mouvance BLM, elle-même parfois accusée d’être téléguidée par les juifs de gauche états-uniens (mais sujette aussi à des accusations répétées d’antisémitisme) pourrait exercer une attirance dans la jeunesse noire, qu’il serait facile de pousser à des actions violentes, débouchant sur le cycle répression – indignation, et activant de vieilles rancunes raciales, le tout bien financé de l’étranger. Mais les services secrets cubains ont déjà déjoué de nombreux complots de ce type. Et pour le moment, aux USA, BLM met la pédale douce sur les discriminations raciales en ce qui concerne Cuba, pour s’opposer à l’embargo US, comme un seul homme!
Afin de garder le contrôle de la population pauvre qui est au bord de la famine, le gouvernement cubain a misé jusqu’ici sur la frayeur inspirée par le Covid, exaltant à juste titre la fierté nationale avec un vaccin local, Abdala, mais bloquant au maximum jusqu’aux déplacements indispensables des particuliers pour aller chercher de quoi se nourrir, sous prétexte de lutte contre la propagation du virus. Les US, naturellement, bloquent l’approvisionnement en seringues, comme pour les autres articles de première nécessité. Mais d’autres approches du Covid et du covidisme sont possibles…
Le souverainisme cubain pourrait-il avoir des alliés aux US ou en Israël? Évidemment, les mesures prises par Donald Trump pour renforcer l’embargo sur Cuba n’ont pas donné l’occasion aux Cubains d’apprécier les mesures souverainistes de celui-ci; cependant, la Floride étant un des États les plus fidèles au projet MAGA, il pourrait y avoir des points de convergence pour une réconciliation avec certains secteurs de la colonie cubaine de Miami. D’un autre côté, c’est le président Obama qui avait fait des démarches pour en finir avec les sanctions inspirées depuis le début par le traitement israélien des Palestiniens, un véritable étouffement à petit-feu, sans y parvenir.
Après la dernière tentative pour enclencher une révolution de couleur locale, sans succès pour le moment, le gouvernement cubain peut s’inspirer de l’expérience de la Syrie et de l’Iran, où l’autorité suprême a su inspirer confiance au peuple pour la résistance, jusqu’à la victoire.
[1] Voir aussi https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_des_Juifs_%C3%A0_Cuba; la notice en anglais est plus développée: https://en.wikipedia.org/wiki/History_of_the_Jews_in_Cuba.
[2] En 1947, l’ambassadeur de Cuba à Washington Guillermo Belt aurait reçu des menaces de la part du directeur du New York Times, après quoi il disparut de l’histoire politique de Cuba.
[3] Autres Américains d’origine cubaine actifs pour promouvoir une révolution de couleur à La Havane:
Marco Rubio, sénateur pour la Floride depuis 2010, Mario Díaz-Balart, de famille partiellement juive, et parent de Fidel Castro, lui-même descendant d’une famille d’origine marrane bien connue en Espagne.
[4] Quelques données sur l’immigration juive à Cuba, dans son contexte: 1916, création de la première association d’entraide communautaire juive, l’Union israélite Chevet Haim. 1921: constitution du Comité juif de Cuba : ces deux institutions favorisent l’immigration juive européenne. Une banque est créée à cet effet. Une industrie juive se développe à La Havane (quartier de La Picota) : fabrication de meubles, bonneterie, confection, taille des diamants, parfums, miroiterie, teinturerie, restauration. Ouverture de trois synagogues à La Havane. Estimation par la presse de la population juive vers 1920 : 15000 personnes. En 1939, selon les documents officiels, les juifs sont 12 000, soit un pour 400 habitants, et 0,26% de la population. Ces juifs sont Cubains et natifs de Cuba. Cuba compte aussi 12 000 Turcs, 13 500 Américains du Nord et 37 000 Chinois. Il existe une presse juive diversifiée : Vida habanera, hebdomadaire, 1 édition en yiddish ; Páginas cubanas, mensuel littéraire ; Aurora, mensuel en yiddish de tendance sociale et littéraire ; El estudiante hebreo. Un écrivain métis, Eliasar Aranovski écrit Amaceo, poème à la gloire de l’indépendance cubaine.Autre écrivain d’origine juive, Oscar Pinis abonde dans la ligne anti-espagnole, avec Hatuey, éloge de la résistance indienne à la Conquête. Dubilman écrit En tierras cubanas. (Richard Pava, Les juifs à Cuba, Nantes, 2001, p. 21-22).
En 2000, la population juive de Cuba s’élèverait à 1500 personnes.
[5]. Rafi Eitan était le chef du Mossad pour toute l’Amérique latine, outre son rôle d’agent traitant de l’espion Jonathan Pollard, qui pilla les secrets de l’industrie US au profit de l’État d’Israël, lequel en revendit une partie à la Russie. Rafi Eitan faisait l’objet d’un mandat d’arrêt du FBI. Jonathan Pollard fut condamné à perpétuité en 1985, purgea 30 ans de prison, puis s’installa triomphalement en Israël en 2020.
En 1960, c’est Rafi Eitan lui qui avait mené à bien la capture d’Adolf Eichman à Buenos Aires, et organisa la chasse à plusieurs autres personnalités nazies, dont Joseph Mengele. Il avait été conseiller en matière de « lutte contre le terrorisme » de Menahim Begin, puis du Shabak; personnage polyvalent et imaginatif, c’est lui qui conseilla de dissoudre le cadavre du dirigeant Ben Barka dans la soude. Il joua aussi un rôle central dans la destruction de la centrale nucléaire d’Ozirak, en Irak, en 1981. En Amérique latine, on découvre son ingérence auprès des gouvernements les plus divers.
– Rafi Eitan fut conseiller du président colombien Virgilio Barco, de 1986 à 1990.
– En 2006,il fit savoir dans la presse israélienne, qu’il était un ami personnel de Fidel Castro, et ce depuis longtemps, car il se rendait régulièrement à Cuba: ce fut un scandale retentissant. Il y créa d’immenses structures agro-industrielles pour la production d’agrumes destinés à l’exportation, et fut un magnat de l’ immobilier, avec des hôtels et des lotissements de résidences secondaires réservés à une clientèle israélienne.
Rafi Eitan finit sa carrière comme ministre des retraités en Israël, avant de mourir le 23 mars 2019, et d’y être enterré avec les plus grands honneurs. Voir https://www.jpost.com/jerusalem-report/the-spymasters-tale-415725.
[6] En 1999, on n’estime plus la communauté juive de Cuba qu’à 500 familles, soit 1500 personnes. Cette année-là, on apprend que des accords secrets avec Israël permettent une vague d’émigration pour Israël via le Canada, moyennant une forte redevance acquittée par Israël ; (la rumeur fait état de $5 000 par personne, M. P.). C’est la Mexicaine Margarita Zapata, fille d’Emiliano Zapata, qui a engagé les négociations en 1992 pour le troc baptisé « Opération cigare ». Un certain Manteber Arno est à la tête de l’Agence juive à La Havane. La viande cachère est importée du Mexique. En 1995, le président israélien Weizmann rencontre Fidel Castro en Afrique du Sud. De source israélienne, 600 Cubains auraient quitté leur pays pour Israel, dans des conditions qui ne font nullement d’eux les réprouvés que sont les autres candidats à l’émigration du point de vue des autorités cubaines, qui multiplient les entraves légales au départ, et interdisent la réinstallation à Cuba de ceux qui le souhaitent. Selon Richard Pava lui-même « seuls les juifs peuvent partir librement de Cuba, au détriment des autres Cubains » (op.cit., p. 123), et certains juifs reviennent effectivement ! Beaucoup, une fois arrivés à Tel Aviv, cherchent à rejoindre New York, démarche de la grande majorité des Cubains qui envisagent l’expatriation dans n’importe quel autre pays dans un premier temps, comme un tremplin vers les USA. Le transit se fait dans les années 2000 plutôt par Paris que par Ottawa. Une personnalité a été autorisée en 1995 à s’installer en Israël : le cardiologue Alberto Toroncha.
[7] A Guanabacoa, faubourg de La Havane, se trouve un cimetière ashkénaze de 2300 sépultures. Il date de l’instauration de la première république cubaine, en 1902. On y trouve un monument surplombé d’une urne, avec l’inscription suivante : « Honorant leur mémoire, dans ce lieu sont enterrées diverses pastilles de savon fabriquées à partir de la graisse humaine de juifs qui font partie des six millions de victimes de la barbarie nazie survenue au XX° siècle. Paix à leurs restes », texte en hébreu et en espagnol.
[8] Ce qu’on appelle la guerre hispano-américaine de 1898 et qui mit fin à la souveraineté espagnole sur Cuba, permettant aux Etats-Unis de s’implanter sur l’île reconnue par tous comme la « clé du nouveau monde » a été rendu possible par deux opérations concomitantes : une intense campagne de soutien aux insurgés cubains par le groupe de presse Hearst, et l’explosion du cuirassier Maine dans la baie de La Havane, le 15 février 1898, qui fit 260 morts parmi les marins –très majoritairement noirs- et 6 officiers (sur un équipage de 350 hommes et 24 officiers). Cette explosion, les historiens cubains ont établi qu’elle avait été mise en œuvre par le parti interventionniste américain, et qu’elle a parfaitement fonctionné comme la provocation qu’elle était: imputée aux Espagnols, bouleversant les lecteurs de la presse Hearst, elle a permis le vote d’une intervention militaire et d’un débarquement, la liquidation de la présence militaire espagnole dans toute l’Amérique hispanique, et de l’armée cubaine des insurgés se battant pour l’indépendance.
Source : Entre la Plume et l’Enclume
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