Par Leila Mazboudi

Fidèles à leur habitude, les médias israéliens se sont intéressés au contenu du discours du chef du Hezbollah, leur ennemi numéro un.

Sayed Hassan Nasrallah avait d’ailleurs consacré une partie de son discours du mardi 16 février pour répondre aux menaces israéliennes de « jours de combats », proférées par le chef d’état-major israélien Aviv Kochavi et qui avaient escorté les manœuvres militaires de grande ampleur réalisées au cours de ce mois-ci. Elles ont simulé une guerre contre l’Iran, la Syrie et le Liban et prenant en compte des tirs depuis l’Irak et le Yémen. Puis elles ont été couronnées par des exercices de trois jours, baptisées Tempête d’éclair, consacrés à la simulation d’une guerre contre le Hezbollah, sur le front nord de la Palestine occupée.

Impliquant toute la panoplie d’armements de la force aérienne israélienne, elles ont été amplement médiatisées, constate le journal libanais al-Akhbar. Pour des considérations de dissuasion. L’entité sioniste est « debout sur une seule jambe », selon le terme de S. Nasrallah, depuis qu’il a menacé de venger la mort d’un combattant du Hezbollah dans un raid aérien israélien à proximité de Damas, en juillet 2020.

Sur ces exercices, les médias israéliens ont retenu lorsque Sayed Nasrallah les a qualifiés de «jeu dangereux » et de « jeu avec le feu ».
Ils se sont presque tous intéressés à sa mise en garde, qu’au cas où Israël déclenche la guerre, « son front intérieur verra des choses qu’il n’a jamais vues depuis sa création en 1948 ». Rappelant aussi qu’il avait dit auparavant que « nous ne cherchons pas à nous battre avec Israël », selon le rapport de la Treizième chaine de télévision israélienne.

Cette dernière retient aussi sa menace de rendre la pareille à ‘Israël’, et de bombarder les villes s’il bombarde les sites civils libanais.

« Si Israël bombarde des villes au Liban, nous bombarderons des villes en Israël, et s’il bombarde des villages au Liban, nous bombarderons des agglomérations en Israël. Si l’armée israélienne bombarde nos cibles militaires, nous pouvons également attaquer les cibles militaires d’Israël…Personne ne peut garantir que quelques jours de combat entre nous et Israël ne conduiront pas à une guerre plus large » », a-t- rapporté la télévision israélienne du discours de Sayed Nasrallah.

Constat lexical : Sayed Nasrallah n’a pas dit le mot agglomérations mais colonies. Il n’a pas non plus répété comme dans la traduction le mot ‘Israël’ à 5 reprises. Il parlait à la seconde personne du pluriel, après s’être adressé à Kokhavi.

Constat thématique : les médias israéliens ont omis de rapporter ce que le chef du Hezbollah avait dit en prélude à ce paragraphe, en réponse aux déclarations du chef de l’état-major israélien qu’Israël « ne va plus distinguer dans la prochaine confrontation entre les cibles civiles et militaires ».

« Israël n’a jamais respecté le droit international. Il a détruit des villes et tué des civils dans toutes ses guerres. »

Israël a tué des juifs …et ses alliés aussi

Autre omission majeure dans les médias israéliens sur ce discours. La partie où il a assuré que des juifs sionistes ont bel et bien tué des juifs qui ne l’étaient pas.

Sayed Nasrallah a dit :
« A la base des mémoires d’un certain nombre de responsables du Mossad et à la base d’articles qui sont écrits de nos jours aussi dans certains journaux de l’entité de l’ennemi et de certains livres, Israël ne tue pas seulement ses agents. Il tue son propre peuple, ses propres gens, il tue des juifs… Des juifs. Il les tue pour servir son projet…. En Egypte, ils ont tué des juifs. C’est inscrit dans les procès, les investigations, les aveux et les mémoires. Parce qu’il y avait des juifs égyptiens qui n’ont pas accepté d’émigrer en Palestine. Ils ont alors exécuté des assassinats et des explosions contre eux pour qu’ils y aillent. En Irak, il en a été de même avec des assassinats et des attentats aux explosifs pour les pousser à aller en Palestine. Et en Europe de l’est et de l’ouest, ils ont aussi exécuté des attentats pareils ».

Le numéro un du Hezbollah rapporte aussi des attentats similaires, sous fausse bannière, contre des alliés d’Israël, pour les attribuer aux pays arabes et empoisonner leurs relations avec eux.

« Et en plus ils ont fait ceci aussi avec des pays qui soutiennent le projet israélien comme les Anglais et les autres. Les appareils israéliens ont exécuté dans les années 50 et 60 des attentats aux explosifs et des assassinats contre des occidentaux qui soutenaient Israël dans le but de monter ces pays occidentaux contre l’Egypte, contre l’Irak ou d’autres pays arabes. Ceci est inscrit dans les livres », a-t-il rapporté aussi.

« Vous savez quoi de l’histoire d’Israël et du sionisme et de ses massacres, non seulement contre les Musulmans, les Chrétiens et les Arabes, mais aussi contre les juifs eux-mêmes qui refusaient d’émigrer en Israël et qui refusaient l’idée d’Israël et qui vivent actuellement dans de nombreux endroits dans le monde ».

Et de conclure: « Oui le cerveau israélien est capable de faire ceci. Si vous ne le savez pas, c’est parce que vous êtes ignorants ».

Échecs des tentatives pour affaiblir le Hezbollah

Sayed Nasrallah s’adressait dans cette séquence de son allocution à l’intérieur libanais, secoué par l’assassinat d’un militant libanais chiite, Lokmane Slim, qui était farouchement hostile au Hezbollah et à son environnement populaire.

En boucle, dans ce qui semble faire partie d’une campagne orchestrée « par une même chambre», selon la description de sayed Nasrallah, les adversaires de la voie de la résistance au Liban se sont mis attribuer au Hezbollah la responsabilité de ce crime, arbitrairement. Sachant que le Hezbollah a publié un communiqué pour le dénoncer et porté plainte devant la Justice libanaise contre ceux qui l’accusent sans preuve. Les partisans de la résistance avaient alors répliqué dans les médias et sur les réseaux sociaux en disant qu’il a été liquidé par ses propres alliés, « ses commanditaires ».

Etant un pro américain convaincu et prônant la normalisation avec ‘Israël’, il avait appelé à la décimation de la communauté chiite lors d’une conférence dans un pays du Golfe. Mais personne de cette communauté n’était au courant de ses déclarations haineuses à leur encontre. Son influence en son sein était quasi nulle. Il était du coup incapable de la diviser pour la monter contre le Hezbollah. Un objectif auquel aspire les Américains au Liban dans une énième tentative d’affaiblir le Hezbollah.

Des observateurs avisés ont prévenu depuis quelques semaines qu’une nouvelle vague d’assassinats était prévisible dans les rangs des adversaires pro occidentaux de la résistance, pour provoquer une onde de choc au cœur de l’opinion publique libanaise et la monter contre le parti de la résistance libanaise. Un scénario qui ressemble à ce qui s’était passé lors de l’assassinat de l’ex-Premier ministre Rafic Hariri et qui devait remédier aux échecs essuyés par toutes les tentatives antérieures.

Depuis celle de confisquer le mouvement de contestation qui a éclaté, fin 2019, et qui a été exacerbé par une crise économique et financière sans précédent. Une crise causée, entre autres, par l’un des fidèles alliés aux occidentaux, qui avait toujours été encensé dans ses médias mainstream. Sans oublier l’explosion du port, attribuée également au Hezbollah par ses adversaires, lesquels devaient l’exploiter pour provoquer un séisme contre lui. . Cette tentative s’est elle aussi soldée par un échec, de l’aveu de l’ex-vice-secrétaire d’état américain pour le Proche-Orient, David Schenker qui en a attribué la responsabilité aux représentants de la société civile libanaise, sous les ordres de Washington. (Voir l’article sur notre site : « Schenker au Liban après Macron : le mauvais flic laisse faire le bon flic. Revers et messages US ».

Depuis, les USA semblaient être à la recherche de nouveau recrues.

Des manœuvres et des menaces

Cet aveu d’échecs successifs de tous les procédés pour abattre le Hezbollah depuis l’intérieur a été implicitement reconnu par le chef des renseignements israéliens Tamir Haïman, selon lequel « l’aggravation de la situation économique et sanitaire n’a pu affecter les efforts de construction de la puissance chez les ennemis d’Israël », rapporte le chroniqueur du quotidien al-Akhbar Ali Haidar.
Et la cerise sur le gateau: la résistance a au cours de ces dernières semaines intercepté deux drones israéliens au-dessus du Liban.

C’est en voulant pallier à ces revers, qu’Israël a mené ses manœuvres, laissant planer le doute de « jours de combat » contre le Liban.
Mais aussi bien leur portée réelle que médiatique ont été neutralisées par les propos de Sayed Nasrallah . « Rien ne peut garantir que ces jours de combat ne dégringolent vers une guerre ouverte », a-t-il mis en garde. Avertissant joutant plus loin: « Ne jouez pas avec le feu ».

« Nasrallah a tenté une nouvelle fois de consolider la dissuasion à travers les menaces qu’ils lancées», a conclu la Deuxième chaine de télévision israélienne.
« Il faut prendre les menaces de Nasrallah avec sérieux… Mais il faut aussi nous rappeler que Nasrallah exerce le combat de la guerre psychologique sur les consciences… c’est un expert de la guerre psychologique dissuasive. Il veut dissuader les Israéliens, qui ne veulent pas de guerre », a compris et fait comprendre le président de l’Institut des recherches sur la sécurité nationale israélienne, Amos Yadlin.

Un retour en quelque sorte à la case départ!

Source : Al Manar
https://french.almanar.com.lb/…