Par Nasser Kandil
Cet article est la réaction à chaud de l’ancien député libanais et rédacteur en chef du quotidien Al-Binaa, M. Nasser Kandil, suite au massacre perpétré dans la soirée d’hier,17 octobre, par des frappes aériennes israéliennes sur l’hôpital Maamadani, situé au sud du centre ville de Gaza, et actuellement dirigé par le diocèse anglican de Jérusalem après avoir été créé et administré par la Mission Médicale de la Convention baptiste du Sud jusqu’en 1982, d’où son appellation signifiant « le baptiste » en arabe.
Appellation que nombre de médias occidentaux réduisent à « Hôpital Ahli Arab » [1], sans doute pour éviter de contredire la propagande qui veut que les atrocités commises par le gouvernement israélien, soutenu par les puissances occidentales, ne frappent que des terroristes islamistes et non des institutions chrétiennes et des Palestiniens chrétiens et musulmans solidaires comme l’a suggéré, une fois de plus, le bureau de Netanyahou en accusant la faction palestinienne du Jihad islamique d’avoir commis ce crime en ces termes : « Que le monde entier le sache : les terroristes barbares à Gaza sont ceux qui ont attaqué l’hôpital à Gaza et pas l’armée israélienne… Ceux qui ont brutalement tué nos enfants, tuent leurs propres enfants ».
CNN en langue arabe a confirmé cette déclaration [2], tandis que les images et les vidéos des médias locaux montrent une horreur et une douleur indescriptibles. Tout lecteur peut les retrouver et surtout agir pour qu’un tel carnage ne se reproduise plus ni en Palestine ni ailleurs. [NdT].
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Le massacre commis par l’armée d’occupation israélienne au moyen de frappes aériennes lancées sur l’hôpital Maamadani de la ville de Gaza est un acte planifié. Il exprime de manière très précise la vision américano-israélienne à la veille de la visite du président des États-Unis en Palestine occupée, pour superviser la planification de la guerre.
Au soir de ce 17 octobre, le bilan initial de ce massacre s’élève à plus de 500 martyrs, mais certains rapports prévoient que ce nombre s’élève à plus de 1000 au fur et à mesure que d’autres victimes seront découvertes et que les blessés mourront à cause de la détérioration des soins médicaux et chirurgicaux en raison de la situation.
Le massacre a été précédé d’un avertissement adressé à l’administration de l’hôpital pour évacuation, mais elle a refusé d’en tenir compte à partir du moment où son directeur a consulté l’administration de la Croix-Rouge internationale, laquelle a répondu que l’hôpital était protégé par le droit international et qu’il ne devait pas avoir peur.
Il faut savoir que ce massacre est survenu alors que cet hôpital accueillait des milliers de personnes déplacées qui ont trouvé refuge dans ses cours et ses jardins et, par conséquent, qu’il abritait la collectivité civile la plus importante du nord et du centre de Gaza ; autrement dit, la zone concernée par la première étape de déplacement de la population.
Il est clair que les dirigeants américains, ainsi que les dirigeants de l’armée d’occupation, sont certains de l’impossibilité de mener à bien une invasion terrestre de la bande de Gaza et qu’un plan alternatif a été élaboré, lequel consiste à déplacer la population vers la frontière avec l’Égypte en vue de son transfert vers le Sinaï après la fin de la guerre.
Une fois cette première étape terminée, les bombes américaines perfectionnées, y compris celles équipées d’uranium et certaines bombes nucléaires tactiques, seront utilisées pour faire sauter les tunnels (creusés sous terre par la Résistance palestinienne).
Dès lors, l’avancée terrestre de l’armée israélienne deviendra un simple défilé spectaculaire sur les corps des martyrs et les décombres de leurs foyers. Et c’est ainsi que l’usage des techniques de mise à mort et de destruction équivaudra à une bombe atomique, voire plus encore, et que Gaza aura subi le sort de Hiroshima et de Nagasaki à la fois.
Ce massacre est un tournant dans le cours la guerre, caril permettra de mesurer l’évolution de l’opinion publique mondiale, à savoir si le racisme parviendra à faire taire les peuples et les élites libres du monde, alors que les milliers de personnes ayant manifesté dans les rues de l’Occident ont crié leur opposition à la ségrégation raciale entre les peuples.
Ce massacre est un tournant dans le cours de la guerre, d’abord parce que rester en silence signifie que ce genre de comportement va se poursuivre et se généraliser ; ensuite, parce qu’il révélera le véritable positionnement des uns et des autres. Est-ce que les Arabes dont les intérêts et les systèmes de gouvernance sont visés par le projet de déplacement ou de transfert, à savoir l’Égypte, la Jordanie et l’Arabie Saoudite, vont réagir en fonction de la gravité de la menace, alors qu’ils ont dans leurs mains des cartes décisives ? Il ne s’agit pas de les entendre annoncer l’annulation de leurs accords avec l’occupant ou l’expulsion des ambassadeurs américains. Il suffirait que le régime jordanien ferme les yeux sur le peuple en colère qui veut marcher vers la frontière avec la Palestine occupée. Il suffirait que le gouvernement égyptien laisse les ouvriers du canal de Suez décider de sa fermeture en protestation contre le massacre jusqu’à ce qu’un cessez-le-feu soit imposé. Il suffirait que l’Arabie Saoudite laisse les travailleurs d’Aramco décider de l’arrêt de l’exportation du pétrole jusqu’à ce que les tirs cessent pour que l’Occident, agenouillé devant Tel-Aviv, se précipite vers les capitales arabes à la recherche de solutions.
Ce massacre est un tournant dans le cours de la guerre, car il pose la question de savoir si la Cisjordanie, où le mouvement Fatah représente la plus grande force populaire et la plus grande force armée en plus de compter des centaines de Palestiniens résistants, peut dormir la nuit et rester les yeux fermés face à ce massacre ? Quelqu’un peut-il imaginer que les massacres à Gaza et sa chute lui laisseront la possibilité de se relever après une telle résistance ? Et enfin, un sort différent attend-il la Cisjordanie, alors que le projet de déplacement de sa population vers la Jordanie est prêt à être mis en œuvre une fois le projet de déplacement de la population gazaouie exécuté ?
Ce massacre est un tournant dans le cours de la guerre si les Arabes et les Palestiniens parviennent à en faire le point de départ d’un projet de cessez-le-feu similaire à l’accord d’avril 1996, né de la fermeté de la résistance et du sang des enfants martyrs suite au massacre de Cana. Or, la situation d’aujourd’hui est en faveur de Gaza en raison de l’horreur des massacres et de la force acquise par la Résistance, mais aussi en sa défaveur en raison des divergences arabes et palestiniennes. D’autant plus qu’en 1996, le président syrien Hafez al-Assad avait fait du massacre de Cana le point de départ de son parrainage, et qu’au Liban les parrains étaient Nabih Berri et Rafik Hariri, non Mahmoud Abbas.
Ce massacre est un tournant dans le cours de la guerre, car la rue arabe censée défendre sa dignité et sortir de l’ère de l’esclavage est la première concernée par la décision de manifester sa désapprobation en assiégeant les ambassades américaines et israéliennes partout où elles se trouvent, jusqu’à ce que sa volonté soit respectée.
Ce massacre est un tournant dans le cours de la guerre, car l’Axe de résistance avait déclaré par la voix de Sayyed Ali Khamenei : « Si les crimes de l’entité sioniste à Gaza continuent, personne ne pourra tenir face aux musulmans et à l’Axe de la Résistance ».
Mais il y a une grande différence entre l’intervention de l’Axe de la résistance seul et son intervention soutenue par les pouvoirs arabes, leur population, ainsi que les Palestiniens réunis. Et ceux qui disent attendre de savoir quelle serait la position de l’Axe devraient commencer par élever la voix contre tous ceux qui n’assument pas leur responsabilité, surtout que les israéliens clament que les États-Unis assumeraient leur responsabilité à leur égard au cas où l’Axe de la résistance intervenait dans leur guerre contre Gaza ; hypothèse qui doit être sérieusement étudiée au cas où elle servirait d’excuse au silence et à l’inaction.
L’Axe de la résistance ne cherche pas à trouver une excuse à l’inaction mais se prépare à affronter les ennemis, raison supplémentaire pour dire que ce massacre est certainement un tournant dans le cours de la guerre contre Gaza, dont il est désormais la seule porte ouverte sur l’espoir.
Nasser Kandil
17/10/2023 ;
Traduction par Mouna Alno-Nakhal
Notes :
[1]Guerre Israël-Hamas : ce que l’on sait de l’explosion d’un hôpital à Gaza qui a fait au moins 200 morts
https://www.tf1info.fr/international/guerre-israel-hamas-frappe-sur-un-hopital-de-gaza-djihad-islamique-heurts-cisjordanie-ce-que-l-on-sait-du-drame-2273318.html
[2]Video : Première déclaration de Netanyahou sur ce qui s’est passé à l’hôpital Maamoudia de Gaza.
https://arabic.cnn.com/middle-east/article/2023/10/18/netanyahu-the-barbaric-terrorists-in-gaza-are-the-ones-who-attacked-the-hospital-in-gaza-not-the-idf
Source : Mouna Alno-Nakhal