Le député d’extrême droite israélien et chef du parti «Pouvoir juif», Itamar Ben-Gvir après les premiers résultats de sondages de sortie des urnes aux élections parlementaires israéliennes, au siège de son parti à Jérusalem, le 2 novembre 2022. [AP Photo/Oren Ziv]
Par Jean Shaoul
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et ses ministres ont salué dans la joie le retour de Donald Trump à la présidence des États-Unis. Ils se réjouissent de ce qu’ils considèrent comme le feu vert au génocide des Palestiniens, qui sera couronné par l’annexion totale de la Cisjordanie et la construction de colonies à Gaza, deux territoires occupés illégalement depuis leur conquête lors de la guerre israélo-arabe de 1967.
Ce n’est pas que la bande de fascistes de Netanyahou eût été fortement contrôlée. Le président américain Joe Biden a soutenu Israël à fond. L’aide militaire de 17,9 milliards de dollars qu’il a accordé à Israël l’année dernière a financé la guerre criminelle de Netanyahou visant à chasser et/ou à affamer les Palestiniens de Gaza.
Moshe Ya’alon, ancien chef d’état-major des Forces de défense israéliennes (FDI) pendant la deuxième Intifada palestinienne et ministre de la Défense sous Netanyahou (2013-2016), a été sur les chaines de télévision pour accuser Israël de commettre des crimes de guerre et de procéder à un nettoyage ethnique dans la bande de Gaza. Il a déclaré: «Ils nous entraînent sur la voie de l’occupation, de l’annexion et du nettoyage ethnique – regardez la bande nord» et la construction de colonies à Gaza.
Ce sioniste juré, lui-même auteur de crimes de guerre, a fait ces commentaires après que la Cour pénale internationale (CPI) eut accusé Netanyahou et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant du «crime de guerre de la famine utilisée comme méthode de guerre» et des crimes contre l’humanité de meurtre, persécution et autres actes inhumains, et a émis des mandats d’arrêt contre eux.
Pourtant, l’administration Biden et la nouvelle administration Trump ont toutes deux condamné la décision de la CPI, s’engageant à défendre Israël et ses criminels de guerre. Et les candidats de Trump aux postes clés de politique étrangère sont allés plus loin. Ils soutiennent ouvertement et avec ferveur les politiques expansionnistes et suprématistes juives d’Israël, notamment l’annexion de la Cisjordanie, le nettoyage ethnique de Gaza et de la Cisjordanie, et la levée des quelques sanctions américaines visant les colons.
Parmi eux figurent :
- Mike Huckabee, ambassadeur des États-Unis en Israël. Huckabee, qui s’est longtemps opposé à la création d’un État palestinien, niant même l’identité palestinienne, a soutenu l’expansion des colonies et a suggéré que l’annexion pourrait «bien sûr» être réalisée sous la nouvelle administration.
- Pete Hegseth, secrétaire à la Défense. Le présentateur de Fox News et ancien officier de l’armée, qui a dénoncé les Nations Unies et soutenu la souveraineté d’Israël sur la Cisjordanie, a appelé à la construction d’un troisième temple juif sur le site de la mosquée Al Aqsa et a publiquement approuvé les guerres d’Israël à Gaza et au Liban.
- Marco Rubio, secrétaire d’État, s’oppose également à une solution à deux États ; il a rejeté les appels à un cessez-le-feu à Gaza et, lorsqu’on lui a demandé si le Hamas pouvait être arrêté sans causer de lourdes pertes civiles à Gaza, il a répondu qu’Israël ne peut pas coexister «avec ces sauvages […] ils doivent être éradiqués »
- Elise Stefanik, ambassadrice auprès des Nations Unies, a dénoncé de manière notoire les efforts insuffisants des présidents d’université pour réprimer les manifestations contre le génocide de Gaza et a contribué à déclencher une vague de répression sur les campus universitaires, avec notamment des suspensions, des expulsions et l’arrestation de milliers d’étudiants et de sympathisants pro-palestiniens. Elise Stefanik a qualifié l’ONU de «cloaque d’antisémitisme» pour avoir condamné les meurtres de Palestiniens à Gaza.
Quant à Trump, lorsque lundi l’armée israélienne a déclaré qu’un soldat israélo-américain, Omer Neutra, que l’on croyait captif, avait en fait été tué en octobre dernier, il a répondu ainsi sur son réseau Truth Social: «Tout le monde parle des otages qui sont détenus de manière si violente, inhumaine et contre la volonté du monde entier, au Moyen-Orient – mais ce ne sont que des paroles en l’air et aucun acte! »
«Si les otages ne sont pas libérés avant le 20 janvier 2025, date à laquelle je prends fièrement mes fonctions de président des États-Unis, cela VA BARDER au Moyen-Orient, et pour ceux qui ont perpétré ces atrocités contre l’humanité. Les responsables seront frappés plus durement que quiconque dans la longue et riche histoire des États-Unis d’Amérique. LIBÉREZ LES OTAGES MAINTENANT ! »
Bezalel Smotrich, chef du parti du Sionisme religieux, ministre des Finances et dirigeant de facto de la Cisjordanie occupée, a déclaré que 2025 serait «l’année de la souveraineté [israélienne] en Judée et Samarie [la Cisjordanie]». Il a appelé Israël à occuper Gaza et à « encourager» la moitié des 2,2 millions de Palestiniens à émigrer d’ici deux ans, affirmant que «cela ne coûtera pas trop cher» et qu’«occuper Gaza n’est pas un gros mot».
Lui et sa base de soutien, les colons ultranationalistes, ont juré de faire tomber la coalition si Israël se retirait. Ils ont fait pression pour la réinstallation des colonies à Gaza. En octobre dernier, quelque 500 colons ont installé un camp près de la frontière pour exiger l’occupation de Gaza et l’expulsion de ses habitants palestiniens.
Haaretz a rapporté l’existence des images satellite de la bande de Gaza montrant que l’armée a démoli des centaines de bâtiments, élargi les routes, construit d’importants avant-postes et installé des relais d’antennes de téléphonie mobile, des réseaux d’eau, d’égouts et d’électricité. Le quotidien cite un officier en poste à Gaza qui a déclaré: «L’armée israélienne ne se retirera pas avant 2026».
Itamar Ben Gvir, chef du Pouvoir juif et ministre de la Sécurité nationale, a déclaré: «Le moment est venu de revendiquer la souveraineté» en Cisjordanie. L’année dernière, les raids et les arrestations massives de l’armée israélienne ont considérablement augmenté en Cisjordanie depuis le début de la guerre de Gaza, tandis que des bandes de colons armés ont mené des attaques quasi quotidiennes contre les Palestiniens, leurs maisons et leurs fermes sous la protection de l’armée.
Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), l’armée israélienne a démoli plus de 1 500 bâtiments palestiniens en Cisjordanie occupée depuis le début de l’année, déplaçant 3 637 personnes et affectant près de 164 000 autres. Les zones les plus touchées sont les camps de réfugiés de Tulkarem, Nur Shams et Jénine, ainsi que Jéricho.
Le mois dernier, Ben Gvir a ordonné la démolition de maisons à Jérusalem-Est et la destruction d’un village bédouin dans le sud du désert du Néguev pour faire place à une communauté juive orthodoxe. Cela faisait fi de la décision historique de la Cour internationale de justice de l’ONU, rendue en juillet dernier, déclarant illégale l’occupation israélienne de plusieurs décennies des terres palestiniennes et appelant à l’évacuation de toutes les colonies de Cisjordanie et de Jérusalem-Est.
Un rapport de l’organisation israélienne de défense des droits humains B’Tselem se concentre sur une facette de cette violence: les graves abus commis contre des Palestiniens par des soldats israéliens à Hébron tout au long de l’été 2024. Il cite 25 témoignages décrivant des actes de violence, d’humiliation et d’abus commis par des soldats contre des hommes, des femmes, des adolescents et des enfants, notamment des tabassages, des coups de fouet, des brûlures de cigarettes, des coups sur les parties génitales, l’injection d’une substance non identifiée, le ligotage et les yeux bandés pendant une longue période, des menaces, des insultes, etc. Ces violences ont été perpétrées ouvertement et, dans certains cas, filmées par les soldats. Aucune des victimes n’a été soupçonnée d’une quelconque infraction ni poursuivie, mais choisies arbitrairement.
En Israël, Netanyahou a utilisé la guerre d’extermination financée et dirigée par les États-Unis contre Gaza pour faire taire ses critiques, renforcer les pouvoirs de son gouvernement et freiner la dissidence, en ciblant les médias, le système juridique et les élections.
La semaine dernière, la Knesset a présenté un projet de loi visant à privatiser les chaînes de radio et de télévision du radiodiffuseur public israélien Kan. Cette mesure fait suite à la décision du gouvernement de boycotter le quotidien libéral Haaretz, d’imposer des sanctions économiques et d’interdire l’utilisation de fonds publics pour la publicité ou les abonnements.
D’autres projets de loi visent à accorder aux politiciens le pouvoir de fermer les médias qui « mettent en danger la sécurité de l’État d’Israël». Netanyahu a déjà fermé tous les bureaux d’Al Jazeera en Israël, à Gaza et en Cisjordanie, ainsi que la diffusion en direct d’Associated Press à Gaza parce qu’Al Jazeera avait utilisé ses images.
Netanyahou et ses complices qualifient les chaînes de télévision portant le moindre critique à l’encontre de son gouvernement: d’«Al Jazeera» ou de «chaînes empoisonnées». Ses partisans ont attaqué physiquement et sur les réseaux sociaux des journalistes et des équipes de télévision lorsqu’ils ont rendu compte de l’invasion de la base militaire de Sde Teiman par des forces d’extrême droite où des soldats ont torturé et abusé sexuellement de prisonniers palestiniens; des manifestations Haredi contre leur enrôlement dans l’armée israélienne; des manifestations antigouvernementales appelant à un cessez-le-feu à Gaza et à un accord sur les otages; et le procès pénal en cours de Netanyahou pour des cas bien documentés de corruption impliquant des tentatives de manipulation de la couverture médiatique en sa faveur.
La Knesset a présenté une loi obligeant les partis politiques à faire preuve de «patriotisme» et de «nationalisme», élargissant les critères d’exclusion des candidats arabes des élections municipales s’ils soutiennent, par des déclarations ou des actes, une action armée d’un État ennemi ou d’une entité terroriste contre Israël. Il y a quelques semaines, la Knesset a voté – après avoir échoué de quatre voix à le destituer – la suspension pour six mois d’Ofer Cassif, membre du parti communiste stalinien Hadash et opposant au sionisme, pour avoir qualifié la guerre à Gaza de «génocide» et soutenu la plainte déposée par l’Afrique du Sud contre Israël devant la CIJ.
(Article paru en anglais le 5 décembre 2024)
Source : WSWS
https://www.wsws.org/fr/…