Par Amar Djerrad
«Le prix Goncourt», qui récompense la meilleure œuvre littéraire, a été attribué pour 2024 à Kamel Daoud – algérien dont on a octroyé avec célérité la nationalité française – pour son roman «Houris». ‘Goncourt’ garantit qu’il prime «le meilleur ouvrage d’imagination en prose, paru dans l’année». Au cours des dernières semaines, une intense controverse a éclaté entre la France et l’Algérie, par presse interposée, au sujet de cette attribution. Un prix littéraire ou politico-opportuniste pour celui qui travaille contre son pays?
1ère partie
Des révélations préoccupantes ont mis dans l’embarras l’éditeur Gallimard, Le Goncourt et une certaine France. Après avoir bénéficié de la propagande médiatique promouvant son livre, il s’est avéré que l’histoire de la femme – portant une cicatrice à la gorge (après un égorgement), imagé comme «un grand sourire» – qu’il a déclaré avoir «imaginée», repose en fait sur un récit véridique qu’il a indûment utilisé comme sujet de son roman. Cette femme a déposé deux plaintes(1) en Algérie; visant Daoud et son épouse. Elle envisage de faire de même en Français.
Alors que l’histoire semblait un récit «imaginaire», une femme s’est manifestée sous le nom de Saâda Arbane, déclarant avoir survécu à l’âge de six ans à un massacre du GIA qui a anéanti sa famille. Elle a affirmé qu’elle est la femme du roman et qu’elle a été victime d’une tromperie orchestrée par l’auteur et sa femme «psychiatre», dont elle a été la patiente! Les aspects troublants de sa vie privée, de son traumatisme et de son intimité, partagés avec son médecin, sont narrés en détails dans le livre. Elle a accusé le lauréat d’avoir exploité son dossier médical ainsi que les confidences confiées, en thérapie, à son épouse, pour écrire son roman, sans obtenir son consentement (juste après le décès en 2022 de sa mère adoptive* Mme Mentouri ex-ministre de la santé). Elle a affirmé aussi avoir fermement refusé leur proposition de faire de sa tragique histoire un livre comme l’a fait sa mère auparavant! On peut se demander si les longues séances thérapeutiques n’ont pas été enregistrées. Ecoutons son témoignage(2) dans cette vidéo.
Son avocate, Me Fatima Zohra Benbraham a signalé la récupération de quelques certificats médicaux signés par la psychiatre, mais aussi la disparition du dossier médicale(3) de sa cliente tout en accusant la compagne de l’écrivain d’avoir «violé» le secret médical, en «donnant le dossier médical à son mari…». L’avocate ajoute que Daoud «dispose du verbe» et qu’elle «dispose des preuves». Au sujet des plaintes, elle précise que leur dépôt remonte au mois d’août, «quelques jours après la parution du livre…avant l’attribution du Prix Goncourt…afin qu’il ne soit pas dit que nous voulions perturber la nomination de l’auteur».
Bien que né 8 années après l’indépendance de l’Algérie, et donc dans un pays libre, Daoud s’affiche bizarrement ‘‘nostalgique’’ de la colonisation en déclarant que «si nous, les Algériens, sommes incapables [de respecter la terre], alors autant la rendre aux colons». Il a dit un jour, qu’il n’a pas de lien avec la guerre d’indépendance et qu’il n’a aucune dette envers ceux qui l’ont menée. Il ne critique que l’Algérie, les «arabo-musulmans», les Palestiniens (en se rangeant du côté des bourreaux)(4) et l’Islam – auxquels il fait porter tous les maux – plutôt que parler de littérature. Avec de telles prises de position, il ne s’est fait que des ennemis, même parmi ses amis, surtout en prenant fait et cause pour le colonialisme et le sionisme avec abjection. On lui a décerné le prix pour ça. Selon lui, les Algériens ne le considère pas comme «vrai Algérien» parce qu’il ne répond pas à leur critère: «la haine de la France». Ce qui est inexact! En Algérie, on aime les Français patriotes qui n’aiment pas les sionistes! Les Algériens ne haïssent pas la France, ils haïssent la politique néocolonialiste et l’arrogance des gouvernants et politiciens français.
Dans le contexte de cette controverse, deux passages d’articles ont retenu notre attention. L’un est extrait du quotidien généraliste belge(5) «Le Soir», et l’autre provient «du magazine français Le Point»(6).
Le journal belge parle d’une «affaire littéraire» en rapport avec l’interdiction de «Houris» en Algérie et le refus fait à l’auteur et à Gallimard de participer au «Salon du livre d’Alger». Il associe cela à ce qu’il qualifie être «une autre attitude de la part d’un régime qui a interdit toute publication sur la guerre civile qui a causé 200.000 morts dans les années 1990 en Algérie» ? Sur ‘‘l’héroïne’’, l’article détail: «Elle a été égorgée…elle a survécu, mais ses cordes vocales ont été détruites…Elle se parle, elle écrit, elle porte l’histoire de l’Algérie déchirée. Elle a ouvert un salon de coiffure dans cette Algérie vouée aux strictes lois coraniques...elle parle à son bébé…dans son ventre, en décidant qu’elle serait une fille». La réalité est que le «régime», n’interdit pas les publications sur cette période nommée «décennie noire». La vérité est que des Algériens douteux ayant des liens avec certains milieux français hostiles incitaient, par leurs écrits, à la poursuite du conflit et à la haine, après la loi sur la «réconciliation» qu’ils critiquaient vertement, du temps de l’ex-président. Il a bien fallu les dissuader. Des milliers d’articles, d’avant et après cette époque, sont disponibles. Cette guerre n’était pas «civile»; c’était une guerre des islamo-intégristes ‘‘contre les civils’’. L’autre remarque est que cette «Elle» n’a pas «écrit»; elle ne porte pas «l’histoire de l’Algérie»; elle ne décide pas du sexe de son bébé dans son ventre. L’auteur élucubre sur un pays dont il a une connaissance limitée et sur un sujet qu’il ne maîtrise pas pleinement.
Dans sa chronique du «Point», intitulée «comment on brûle les romans en Algérie», Daoud évoque son livre «interdit en Algérie, alerte sur la mainmise croissante de l’islamisme sur la justice, l’école, les médias, la culture…». En fait, c’est lui qui s’est fait ‘‘griller’’. Son livre et Gallimard n’ont pas été autorisés à participer au Salon, là où des centaines d’éditeurs, de plusieurs pays, ont contribué en exposant des milliers de livres. À quelle réaction s’attend-il quand il ne cesse de claironner en France son hostilité à tout un peuple, à ses martyrs, aux Arabes, à l’Islam, à la femme, à soi-même; glorifiant le colonialisme et le sionisme jusqu’à les absoudre ? Peut-être espérait-il qu’on lui déroule le tapis rouge parce que ‘primé’ au Goncourt?
Concernant la prétendue ‘mainmise’ de l’islamisme sur les institutions notamment sur l’école, le système judiciaire et autres, il s’agit d’un mensonge. C’était le vœu des «islamistes». Daoud, d’une manière instinctive, fait ressurgir ce que l’idéologie islamiste a inscrit dans son subconscient lorsqu’il était membre de cette secte, c’est-à-dire le projet «islamiste» avorté par les algériens et leur armée. Par ruse, il transpose les «rêves» sociétaux islamistes, diaboliques et chimériques, comme étant réalisés par les gouvernants actuels en suscitant chez les Français, mal informés, la crainte d’une menace provenant d’Algérie. Il sait exactement ce qu’ils souhaitent entendre et ce qu’ils préfèrent ne pas voir chez eux. Avec ses instigateurs, ils s’évertuent à vendre aux Français des mythes et à provoquer la peur pour les manipuler. Ce sont, en fait, eux le danger pour la France. À l’endroit des Algériens, leurs fadaises ne font pas mouche; ils pouffent quand ils entendent leurs pseudo-analyses.
2ème partie
Daoud se prétend émancipateur des femmes, il a en réalité exploité malhonnêtement l’intimité et les secrets d’une femme victime en les révélant au public pour se valoriser et s’enrichir!
Au sein de sa secte pernicieuse, la femme est réduite à un simple objet, sans valeur, à l’exception de son rôle sexuel, que les islamo-intégristes intègrent dans tous leurs discours à prétention religieuse, dans n’importe quel sujet. Ils abordent les droits des femmes, conformément aux préceptes de l’Islam, seulement dans le but de tromper et de dissimuler leurs frustrations. Daoud est resté imprégné par leur idéologie puisqu’il l’évoque dans presque toutes ses interviews, en s’efforçant de la ‘défendre’ à travers des paradigmes occidentaux pour plaire à la doxa. Bien que son ex-épouse ait obtenu sa condamnation par un tribunal à Oran pour violence physique, ses soutiens franco-sionistes, aux intentions malveillantes, s’emploient à le dépeindre comme un défenseur du ‘féminisme’ et de la ‘liberté’, lui le renégat, l’aigrefin. Ecoutons les explications de l’avocate(7)(voir aussi à 1:12:55) de la plaignante Saâda Arbane. Quand on cherche présomptueusement la puissance et la richesse on perd souvent sa dignité.
La France, sa récente patrie, enregistre des niveaux inédits de violations des libertés, notamment d’expression, ainsi que des actes de censure. Les exemples sont nombreux, parmi lesquels figurent Sputnik et Russia Today, du fait de sa subordination à des lobbys qui tiennent la bride. Il n’y a plus de pluralisme de l’information puisqu’elle est détenue par un quarteron de milliardaires amis qui vont jusqu’à acheter l’École Supérieure de Journalisme. Même le ‘Canard enchainé’ a été absorbé. C’est une illusion de croire que les Français sont libres! Même leurs Institutions sont gangrénées et perverties. Leurs médias ont banni de dizaines d’écrivains, d’analystes, de journalistes et penseurs notables. La liberté d’expression et le pluralisme de l’information ne sont plus l’apanage de la France ‘Macroniste’. Seuls quelques sites d’informations, indépendants, dits «alternatifs», résistent.
Ce livre n’est pas une œuvre «littéraire». Il s’agit plutôt d’un pamphlet politique d’un genre déplorable, s’attaquant à l’Algérie en injuriant son peuple, à son passé révolutionnaire, à l’Arabe et à l’Islam, dont le centre du récit tragique – qu’il affirme avoir «imaginé» – est en réalité celui d’une femme réelle, blessée, défigurée, outragée de laquelle il a volé les secrets terribles de sa vie, pour en faire un roman émétique façonné en fonction de ce que veulent les dégénérés entendre de malpropre sur les musulmans et les arabes, afin de conforter leur conscience coupable et valider leurs stéréotypes. Daoud, par ses écrits de compromis, apparaît comme un auteur qui dulcifie tout en falsifiant l’ignominie coloniale. En inversant les accusations et en réhabilitant les comportements coloniaux, il ne s’inscrit pas dans la lignée des romanciers au sens littéraire classique, méritant déférence et récompense. C’est le néocolonisé du XXIe siècle, le porte-voix par conviction de ses maîtres colonialistes et suprémacistes qui trouvent en lui un parfait alibi arabe.
Plusieurs commentateurs soutiennent que la distinction de Daoud ne pouvait résulter, autrement, que sous l’influence d’une directive politique qui aurait joué dans la sélection de ce roman en raison de ses relations avec Emanuel Macron et Bernard-Henri Lévy. Pour des calculs politiques malsains, de vrais talents français en littérature ont été écartés et privés du prix. Dans cette vidéo intitulée «d’un fascisme à l’autre»(8), cette bonne dame a qualifié K. Daoud »d’illustration de la récupération politique aussi frappante que terrible ». «En France, ils aiment bien les arabes, seulement si c’est des arabes qui n’aiment pas les arabes et qui critiquent les arabes» dit-elle. Ce choix politique, qui s’inscrit dans la stratégie culturelle de la France en Algérie et en Afrique, conforte leurs thèses néocolonialistes et islamophobes. Ce phénomène de politisation des événements se manifeste fréquemment, y compris dans le domaine sportif. Il suffit de se rappeler le refus de l’Occident, d’accepter la participation de la Russie aux compétitions sportives. Les ‘Nobel’ de littérature et de la paix n’ont pas échappé aux pressions politiques non plus. Leur prestige s’amenuise au point où Le Goncourt est qualifié de «mafia Goncourt»(9).
Le Dr Ahmed Bensaada, le décrit remarquablement dans un de ses articles(10) qu’il a intitulé «Kamel Daoud, l’écrivain qui vomit sur son peuple». Il cite Aymeric Caron qui, dans une émission télé, a lancé à Daoud: «On a le sentiment en vous lisant…que vous n’aimez pas fondamentalement être aujourd’hui un Algérien en Algérie».
Gallimard, qui formate les auteurs, dit dans un communiqué: «si Houris est inspiré de faits tragiques survenus en Algérie durant la guerre civile des années 1990, son intrigue, ses personnages et son héroïne sont purement fictionnels» et dans la foulée, comme de tradition tordue, quand il s’agit de l’Algérie, il ajoute le mantra que l’auteur fait l’objet de «violentes campagnes diffamatoires orchestrées par certains médias proches d’un régime dont nul n’ignore la nature». « Régime »? Que pense cet éditeur du « régime » nazi/Vichy. On peut poser la question si l’on se réfère à cet article du ‘‘Nouvel Obs’’ de 2014(11) intitulé «La curieuse histoire de Gallimard et de la biographie d’Hitler» où l’on insinue une collaboration. Le Dr Bensaada l’a confirmé (12) lors d’une interview de la chaine AL24!
Kamel Daoud a fait un virage à 180°; reniant les principes, calomniant les siens et souillant son essence y compris les martyrs de la guerre de libération. Pourtant, ce sont ces martyrs qui lui ont permis d’étudier gratuitement. Sans eux, il serait encore esclave. Il pouvait rester probe en France, en usant des bonnes actions, sans compromission, que de faire dans la soumission, la provocation et l’abjection. Tout comme son ami romancier, le ‘‘sayan’’ Boualem Sensal, franco-algérien d’origine marocaine qui a soutenu dans un média d’extrême-droite, ‘‘Frontière’’ (dont il est membre du comité stratégique), qu’une partie de l’Algérie de l’Ouest était marocaine. Il tombe ainsi sous le coup de la loi pour «atteinte à l’unité nationale et à l’intégrité territoriale du pays». À propos de Sansal, l’ami de Daoud et des lobbys franco-israélien, l’académicien Jean-Christophe Rufin ‘menace’ l’Algérie ainsi : «si Boualem Sansal n’est pas libéré», il proposera «son élection, exceptionnelle et immédiate, parmi les Immortels». Si leur agent est aussi «précieux», il peut proposer mieux : rebaptiser la Grande Tour parisienne «Tour Sansal»!
Kamel Daoud restera «arabe», même lauréat du Goncourt ou du Nobel. En son for intérieur, il sait ce qui il est; ce que les Algériens pensent de lui; comment son imposture sera jugée!
Terminons par un passage du livre de l’essayiste Ahmed Bensaada(13) (écrit en 2016), sur Kamel Daoud, décrivant les ‘‘caractéristiques de l’écrivain néocolonisé’’, de ce que les spécialistes, dit-il, appellent «l’alibi ethnique » ou « l’informateur indigène»: «L’écrivain néocolonisé du 21e siècle …est celui qui se fond dans la littérature de l’ex-colonisateur, en épouse automatiquement les idées les plus réactionnaires, use et abuse des stéréotypes et s’évertue à diaboliser sa communauté en les brandissant dès que le froufrou d’un hijab fait frissonner l’actualité. Ce n’est d’ailleurs qu’à ce prix qu’il est allégrement accepté, exhibé dans tous les plateaux médiatiques, exposé dans les prestigieuses tribunes littéraires, affublé de superlatifs pompeux, comparé aux plus grands auteurs métropolitains et ″anobli″ par de prestigieux trophées».
Amar Djerrad
Notes
(2) https://youtu.be/MPIz8YEgBwE?t=168
(4) https://youtu.be/86EiyrmVJV4?t=105
(7) https://youtu.be/rUqLoq8SLrk?t=1668
(8) Kamel Daoud, d’un fascisme l’autre
(9) https://youtu.be/hIa2mIPLt6Y?t=256
(12) https://youtu.be/rUqLoq8SLrk?t=3662
(13) https://editionsfrantzfanon.com/produit/kamel-daoud-cologne-contre-enquete/
(*) https://fr.wikipedia.org/wiki/Zahia_Mentouri
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