Des flammes et de la fumée s’élèvent lors d’une frappe aérienne israélienne sur Dahiyeh, dans la banlieue sud de Beyrouth, au Liban, dimanche 20 octobre 2024. [AP Photo/Hussein Malla]

Par Alexandre Lantier

Les forces israéliennes ont frappé des cibles dans le nord de Gaza et au Liban ce week-end après que des responsables américains, allemands, britanniques et français se sont rencontrés vendredi à Berlin pour discuter des plans israéliens pour un bombardement massif de l’Iran.

Israël a tué au moins 87 personnes dans un bombardement sur Beit Lahiya hier, selon le ministère de la Santé de Gaza, et en a blessé au moins 40, dont beaucoup grièvement. Les responsables israéliens ont affirmé qu’ils visaient une «cible terroriste» et se sont vantés d’avoir «éliminé des dizaines de terroristes». Avant la frappe, les autorités de Gaza avaient déclaré que l’offensive israélienne en cours dans le nord de Gaza, lancée le 6 octobre, avait déjà fait plus de 400 morts.

Kamal Adwan, un Palestinien de 36 ans vivant dans le nord de Gaza, a déclaré à l’AFP: « Nous sommes pris au piège, sans nourriture, sans eau ni médicaments, menacés de famine et entourés de ruines ».

Les responsables de l’hôpital indonésien de Beit Lahiya ont déclaré avoir essuyé des «tirs nourris» de la part des forces israéliennes, qui ont confirmé qu’elles opéraient à proximité. Le ministère de la Santé de Gaza a ajouté que 40 personnes s’y trouvaient lorsqu’il a été touché par une panne d’électricité qui, aggravée par le manque de fournitures médicales, a entraîné la mort de deux patients.

Toujours dans le nord de Gaza, une frappe israélienne sur le camp de réfugiés de Jabaliya, samedi, a tué au moins 33 personnes, dont 21 femmes, et en a blessé 85 autres. Des centaines de milliers de personnes sont prises au piège dans ce camp, assiégé par l’armée israélienne depuis au moins deux semaines.

Le directeur de l’hôpital al-Awda, dans le nord de Gaza, a rapporté que l’afflux de patients avait « entièrement rempli » les salles d’hôpital, les blessés «recevant des soins à même le sol». Les responsables de la santé ont également souligné que les cargaisons de nourriture, d’eau et de fournitures médicales n’atteignaient pas Jabaliya.

Le ministre israélien des Affaires de la diaspora, Amichai Chikli, a défendu les bombardements, affirmant qu’Israël avait «imposé un blocus» à certaines parties du nord de la bande de Gaza, tout en niant que les civils étaient visés. Il a déclaré: «Nous avons permis à la population civile de s’échapper vers la zone de sécurité et nous avons empêché les approvisionnements d’entrer dans la région soumise au blocus.»

Les remarques de Chikli confirment une fois de plus que le gouvernement israélien mène une guerre génocidaire contre l’ensemble de la population de Gaza. Des centaines de milliers de personnes vivent dans ce qu’il appelle des zones de blocus, où ses forces peuvent traiter toute personne qu’elles y trouvent comme des non-civils, c’est-à-dire des cibles militaires pouvant être attaquées et tuées à volonté.

De plus en plus d’informations indiquent que les soldats israéliens procèdent à des arrestations massives et séparent les familles dans le nord de l’enclave. «Les chars israéliens ont assiégé la zone et nous ont tous forcés à sortir de l’école qui nous abritait», a déclaré à Al Jazeera une femme palestinienne portant un bébé sur ses épaules. «Ils ont arrêté tous les hommes et ont demandé à toutes les femmes de partir en groupe. Nous avons tout laissé derrière nous, même le lait pour bébé. Les Israéliens ont commencé à nous bombarder, et leur artillerie, ainsi que leurs drones et avions de guerre, ont également tiré des missiles. Ensuite, ils ont pris d’assaut la zone avec leurs chars et ont ouvert le feu au hasard.»

Sur X/Twitter, le Centre palestinien pour les droits de l’homme a déclaré que la famine causée par Israël et les arrestations massives de civils dans le nord de Gaza équivalaient à un «nettoyage ethnique diffusé en direct». Des soldats israéliens brûlent les camps de réfugiés dans le nord de Gaza après avoir déplacé de force les civils qui y avaient trouvé refuge.

Dimanche, l’armée israélienne a encore lancé au moins neuf frappes sur la capitale libanaise, Beyrouth, dont plusieurs frappes sur des bâtiments civils, à Haret Hreik. Il y a également eu des dizaines de frappes israéliennes sur le sud du Liban, notamment sur Tyr, Bint Jbeil et Nabatieh, y compris une frappe meurtrière qui a touché une ambulance à Tyr. Hier, le ministère libanais de la Santé a annoncé que le bilan des bombardements israéliens depuis le 8 octobre s’élevait à 2 448 morts et 11 500 blessés.

Les forces israéliennes ont également démoli une tour d’observation de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) à Marwahin, dans la dernière de plusieurs attaques contre les forces de la FINUL. L’ONU a publié une déclaration notant que l’attaque d’une position de la FINUL est «une violation flagrante du droit international et de la résolution 1701 du Conseil de sécurité».

Alors que les responsables israéliens intensifient impitoyablement le conflit, il y a de plus en plus de signes qu’une nouvelle escalade israélienne pourrait entraîner des pertes dévastatrices pour Israël-même. Hier, une frappe de drone a touché la résidence du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou dans la luxueuse station balnéaire de Césarée. Netanyahu n’était apparemment pas chez lui au moment de l’attaque.

Alors que le Hezbollah lançait une salve de missiles depuis le sud du Liban contre des cibles dans le nord d’Israël, des responsables israéliens ont également annoncé la mort du colonel Ahsan Daksa, commandant de la 401e brigade blindée israélienne, après que son char et un autre eurent heurté des mines à Jabaliya.

Il existe surtout le risque croissant qu’une frappe israélienne contre l’Iran entraîne une contre-attaque dévastatrice de ce dernier et une guerre généralisée au Moyen-Orient, impliquant toutes les grandes puissances mondiales, notamment les États-Unis, les pouvoirs européens, la Russie et la Chine.

Hier, le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, a averti que l’Iran avait examiné et sélectionné des cibles qu’il frapperait en représailles aux bombardements israéliens. «Toute attaque contre l’Iran signifie franchir une ligne rouge. Nous ne la laisserons pas sans réponse. Une réponse appropriée sera donnée à toute attaque contre les installations nucléaires iraniennes ou à un raid similaire», a déclaré Araghchi, ajoutant: «Nous avons maintenant identifié toutes nos cibles [en Israël], et une attaque similaire sera menée contre elles.»

Tout en soulignant que l’Iran ne cherchait pas à entrer en guerre avec les États-Unis, Araghchi a mis en garde contre le danger que Washington ne lance une guerre contre l’Iran. «Si les Américains avaient une réelle volonté politique, ils seraient en mesure de stopper les attaques et de contenir Israël», a-t-il déclaré. «Si une guerre à grande échelle éclate dans la région, les États-Unis y seront entraînés, ce que nous ne souhaitons absolument pas.»

Le gouvernement Biden continue néanmoins, avec le soutien de ses alliés européens de l’OTAN, d’armer et de soutenir Israël, bien qu’il soit conscient qu’Israël pourrait déclencher une guerre dans toute la région. Vendredi, la chaîne Telegram @Middle_East_Spectator a publié un rapport de renseignement « top secret » datant du 16 octobre sur les préparatifs israéliens en vue de bombarder l’Iran. Des responsables américains ont ensuite confirmé l’authenticité du rapport à CNN.

Le document est intitulé «les forces de défense poursuivent les préparatifs en matière de munitions essentielles et d’activités secrètes de drones, presque certainement en vue d’une frappe contre l’Iran». En examinant les images satellites américaines des bases israéliennes, le document indique qu’au moins 16 missiles balistiques Golden Horizon et 40 ISO2 Rocks ont été chargés sur des avions de guerre à la base aérienne d’Hatserim. Il prévient qu’«une frappe peut avoir lieu sans autre avertissement GEOINT [renseignement géospatial]».

Selon le document, les forces israéliennes se dispersent loin des bases susceptibles d’être frappées par des représailles iraniennes et des images américaines montrent des troupes quittant la base navale israélienne de Haïfa ainsi que la base aérienne d’Ovda, tout en évoquant la dispersion des missiles israéliens Jericho II, capables de transporter une ogive nucléaire d’une mégatonne. Il affirme encore que les services de renseignement américains n’ont «pas observé d’indications laissant penser qu’Israël avait l’intention d’utiliser une arme nucléaire».

Comme tous les rapports de renseignement fuités, il ne peut être pris pour argent comptant. Celui-ci peut refléter fidèlement ce que montrent les satellites espions américains au-dessus d’Israël ou bien être de la désinformation destinée à tromper l’armée iranienne quant aux plans d’attaque américano-israéliens. Dans les deux cas, des responsables américains ont confirmé l’authenticité des documents, qui suggèrent qu’ils connaissent les plans israéliens de bombardement de l’Iran.

Cela implique directement Washington et ses principaux alliés européens. Vendredi, Biden a rencontré le chancelier allemand Olaf Scholz, le Premier ministre britannique Keir Starmer et le président français Emmanuel Macron. Il a ensuite confirmé que lui et les autres dirigeants s’étaient mis d’accord sur la façon de gérer la situation avec l’Iran, ajoutant qu’il était au courant des plans de guerre israéliens, mais qu’il refusait de les dévoiler. Il s’agit là d’une conspiration entre Washington, Berlin, Londres et Paris pour dissimuler à l’opinion publique mondiale la préparation d’une guerre régionale catastrophique, potentiellement nucléaire, au Moyen-Orient.

Source : WSWS
https://www.wsws.org/fr/…

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