Par Nasser Kandil

Dans la nuit du 27 au 28 septembre 2024, suite au bombardement apocalyptique d’Israël sur la banlieue Sud de Beyrouth et avant la confirmation de la mort du Secrétaire général du Hezbollah Sayyed Hassan Nasrallah, l’ex-député libanais et infatigable résistant, M. Nasser Kandil, a invité à une « prière pour sa sécurité et la loyauté envers la Résistance » en ces termes :

« Des millions de sympathisants de la Résistance et de la Palestine ont passé la nuit à prier pour la sécurité de Son Éminence Sayyed Hassan Nasrallah après les annonces répétées de l’armée d’occupation précisant qu’il était la personne ciblée, ainsi que les dirigeants de la Résistance, par l’agression criminelle qui a anéanti tout un quartier résidentiel de la banlieue Sud de Beyrouth.

Des sympathisants qui, en dépit de leur anxiété, ne posent pas trop de questions tant que le Hezbollah garde le silence. C’est le cœur fatigué et épuisé d’affection, d’espoir et de douleur qu’ils suivent ce drame évoquant l’essence même du message du Sayyed quant à la Résistance et à la guerre dans laquelle elle s’est engagée pour défendre la Palestine. Et, en dépit des terribles nouvelles d’aujourd’hui, ceux qui lui ont prêté allégeance pour le soutien de la Palestine ne modifient en rien les termes de leur engagement premier, mais acceptent le destin, bénissent le martyr des dirigeants, et prient Dieu d’épargner Sayyed Nasrallah afin qu’il puisse les mener jusqu’au bout du chemin.

Ce qui s’est passé cette nuit a changé l’image de la région qui est entrée dans une nouvelle phase où les règles de la guerre seront absolument différentes de ce qu’elles ont été. Par ce crime, l’entité occupante a renversé la table à la face du monde entier ; un crime qu’elle n’aurait pu commettre sans la pleine participation des États-Unis. En effet, Washington qui prétend toujours qu’il n’a pas de parti pris, peut interdire l’utilisation d’un camion militaire vendu à n’importe quel pays acheteur en ce monde, mais n’est pas concerné lorsque son avion militaire le plus récent équipé de la plus grosse de ses bombes commet une telle agression criminelle dans la banlieue Sud de Beyrouth et, de surcroit, n’oublie pas d’ajouter qu’il soutient « le droit d’Israël à se défendre ».

Le discours de Benjamin Netanyahou devant les Nations Unies (27 septembre 2024) était clair : il poussera sa guerre à l’extrême, sans restrictions et sans limites, tout en la présentant à l’Occident et à certains Arabes comme une guerre de l’axe de la bénédiction contre l’axe de la malédiction.

Mais, lorsqu’il place sa guerre dans le concept du « choc des civilisations », il ne cache pas qu’il veut utiliser certains Arabes dans son propre intérêt, en dépit du fait que les deux civilisations concernées dans le cadre de ce concept sont, d’après lui, la civilisation occidentale d’un côté, la civilisation orientale de l’autre avec l’Islam en son centre.

Complétant ainsi son discours prononcé il y a deux mois devant le Congrès américain, Netanyahou ouvre grand la porte à une explosion majeure dans la région et dit à l’Occident : avec ou sans coordination préalable avec Washington, soit vous me suivez et vous rejoignez cette guerre, soit vous en recevez les éclats malgré vous, car une telle explosion signifiera une guerre qui fermera les mers au flux de pétrole et de gaz, bloquera le commerce entre l’Orient et l’Occident tant que le transit par cette région reste obligatoire, déversera des millions d’immigrés volontaires ou obligés vers l’Europe, le tout accompagné de troubles et de chaos.

Ce qui signifie que la région a fermé ses portes à la politique, aux négociations et aux règlements jusqu’à nouvel ordre, c’est-à dire jusqu’à ce que la poussière de la guerre se dissipe sur des faits indiscutables qui permettent de rouvrir les portes à des fins décisives ou à de nouvelles négociations.

Ceux qui se présentent en tant qu’adhérents au choix de la Résistance et à sa culture doivent comprendre que les peuples de la région n’ont pas le luxe de critiquer ou de philosopher sur le nécessaire ou le superflu de ce que les forces de la Résistance auraient entrepris. Notre pays n’a que cette Résistance. C’est la meilleure chose que notre Histoire a engendrée. S’il existait une résistance meilleure, nous la verrions à l’œuvre sur le terrain, non dans des salons climatisés émettant telle ou telle théorie.

Les situations de guerre peuvent parfois devenir comparables à celles des religions, dans le sens où tant que l’on croit il n’y a pas lieu de discuter du jeûne ou de la prière parce qu’ils sont des piliers qui tirent leur légitimité de la foi. Quiconque veut la liberté, l’indépendance et la Palestine sait qu’actuellement nous n’avons que cette Résistance. Et c’est notre Résistance qui, par ses réalisations et ses sacrifices, relève la tête de toutes les personnes libres de notre pays et du monde.

Par conséquent, tout comme nous avons suivi la voie de Jamal Abdel Nasser, de Hafez al-Assad, d’Abou Ammar et de George Habache, nous voyons aujourd’hui que toute cette grandeur, qui nous avait attirés à leur époque, se renouvelle dans toute sa splendeur avec la voie de Sayyed Nasrallah. Puisse Dieu le protéger et ne pas décevoir nos prières. »

Nasser Kandil
28/09/2024
[1][ الدعاء بالسلامة والولاء للمقاومة ]

***

Mais les prières des millions de sympathisants n’ont pas intercédé pour la protection de Sayyed Nasrallah et leur peine est infinie.

Le philosophe Alexandre Douguine a considéré que l’assassinat du chef du Hezbollah est le début de la fin du monde [1].

Pour l’éminent écrivain et journaliste libanais, M. Nabih al-Bourgi, c’est comme si c’était la fin de l’éternité [2], mais il introduit son article par cette phrase : «  Nous ne pleurerons pas, nous ne gémirons pas et nous ne porterons pas les tenues de deuil (ce deuil éternel). C’est une époque qui exige que nous soyons aussi solides que les rocs et aussi forts que les ouragans, car c’est ainsi qu’il était… ».

Notes :

[1][Alexandre Douguine : L’assassinat du chef du Hezbollah est le début de la fin du monde]
[2][لكأنه سقوط الدهر]

Traduction de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal

Source : Mouna Alno-Nakhal

Notre dossier Liban