Lettre ouverte de l’AFPS à Gérard Larcher
Monsieur Gérard Larcher
Président du Sénat
15, rue de Vaugirard
75291 PARIS Cedex 06
Paris, le 9 avril 2024
Monsieur le président du Sénat,
Vous avez prévu, ce mercredi 10 avril, de recevoir Monsieur Amir Ohana, président de la Knesset, l’assemblée parlementaire d’Israël ; un État qui perpétue depuis 6 mois un génocide à Gaza, un État qui accélère le nettoyage ethnique en Cisjordanie et à Jérusalem, qui arme les colons, arrête des milliers de Palestinien·nes en violation du droit international et qui les maintient en détention sans aucune forme de procès.
Depuis la création de l’État d’Israël, la Knesset a progressivement construit les bases juridiques d’un régime de discriminations en fonction des origines, devenu aujourd’hui un régime d’apartheid. Selon que vous êtes Juif ou Palestinien vous n’avez pas les mêmes droits concernant l’entrée sur le territoire, l’accès à la terre ou la citoyenneté. Selon que vous êtes Juif ou Palestinien, le droit à l’autodétermination vous est reconnu ou pas. Monsieur Larcher, vous vous apprêtez à recevoir, au nom de la République, un des responsables directs de ce crime contre l’humanité.
La Knesset organise depuis des décennies la « légalisation » en droit israélien des violations du droit international, que ce soit en Israël ou dans le territoire occupé depuis 1967 : comment priver les Palestinien·nes de leur terre, de leurs droits civiques, de leur droit à l’éducation, à la santé, à fonder une famille… des punitions collectives illégales comme le blocus de Gaza ou les démolitions punitives de maisons.
Depuis le 1er janvier 2023, la Knesset a voté plusieurs textes qui simplifient et accélèrent le vol des terres et la construction de colonies ; or, la colonisation est un crime de guerre condamné par la France. Monsieur Larcher, vous vous apprêtez à recevoir au nom de la République, un des responsables directs de ce crime de guerre.
Depuis le 7 octobre la Knesset a voté des amendements aggravant considérablement les conditions dégradantes et inhumaines dans lesquelles Israël arrête et maintient en détention les Palestinien·nes en dehors de toute règle, de manière totalement arbitraire. Toujours plus loin dans la violation du droit international : 15 jours sans avocat, la Croix rouge interdite d’accès, aucune visite…
Le 20 février, elle a voté un texte s’opposant à la création d’un État palestinien, au prétexte que cela serait « une récompense au terrorisme ». Monsieur Larcher, vous vous apprêtez à recevoir l’homme qui a présidé à cette décision qui pourtant découle du droit à l’autodétermination du peuple palestinien.
La Knesset vient de voter une loi permettant d’arrêter et d’emprisonner des enfants de 11 à 14 ans, pour fait de terrorisme (jet de pierre sur l’armée d’occupation) uniquement s’ils sont palestiniens ! Monsieur Larcher, vous vous apprêtez à recevoir le président de l’assemblée qui a voté l’emprisonnement d’enfants de 11 ans !
Quant à la démocratie à la Knesset, les voix qui s’opposent à l’agression systématique du peuple palestinien, et au génocide en particulier, sont tout simplement censurées. Aida Touma-Suleiman a été exclue de la Knesset pour deux mois en novembre pour avoir dénoncé l’engrenage d’une guerre meurtrière à Gaza. Plus récemment, Ayman Odeh a été expulsé manu militari pour avoir dénoncé ce massacre. Dernièrement, Ofer Cassif a été expulsé lui aussi pour avoir qualifié le carnage opéré par l’armée israélienne à l’hôpital Al-Shifa de crime de guerre. En janvier l’extrême droite avait tenté de le faire exclure définitivement de la Knesset.
Pour finir, la Knesset vient de voter une loi autorisant Benjamin Netanyahou à interdire les media étrangers qui « portent atteinte à la sécurité d’Israël ». En clair, les media qui ne relaient pas la propagande de guerre du gouvernement et donne la parole aux Palestinien·nes. Première visée, Al-Jazeera qui se trouve interdit de séjour et d’antenne en Israël mais également en territoire palestinien occupé.
Ainsi va la vie dans ce que certain·es persistent à qualifier de « seule démocratie au Moyen-Orient » et dans son parlement.
Monsieur Larcher, l’AFPS vous demande instamment de ne pas recevoir Amir Ohana qui incarne la violation constante des droits des Palestinien·nes et qui est un des acteurs du génocide en cours à Gaza.
Il est temps de rompre avec le soutien inconditionnel à l’État d’Israël, car il l’assimile manifestement à un permis de massacrer et de détruire.
Recevez, monsieur le président du Sénat, l’expression de notre attachement indéfectible au droit.
Anne Tuaillon
Présidente de l’Association France Palestine Solidarité
Pour le Bureau national
Source : AFPS
https://www.france-palestine.org/…