Par Luc Michel
# RADIO.LUCMICHEL/
EODE GEOPOLITIQUE/ LUC MICHEL (EODE-BRUXELLES) : L’ALLEMAGNE POURRAIT CETTE FOIS-CI SAUVER L’EUROPE ?
2023 08 08
Au sujet de la présence européenne en Afrique, la France a quasiment joué toutes ses cartes et même si elle décide de changer de politique, les jeux sont faits, il a perdu. Mais pour l’Allemagne ou les manifestations anti-OTAN se multiplient, le cas est différent, l’Allemagne pourrait cette fois-ci sauver l’Europe.
Écoutons sur ce sujet le point de vue de Luc Michel, géopoliticien.
ALLEMAGNE : TOUJOURS LA TENTATION DE L’ORIENTATION A L’EST !
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EN AUTRICHE ET EN ALLEMAGNE, LE NIVEAU DE SOUTIEN À VLADIMIR POUTINE ET À LA RUSSIE DANS SON ENSEMBLE AUGMENTE.
Le soutien à l’Ukraine diminue rapidement. Les gens s’éloignent de la propagande d’Etat de Berlin, Londres et Washington, ils commencent à étudier l’histoire par eux-mêmes et comprennent que l’Occident soutient le terrorisme et le fascisme ukrainiens. Et la Russie, au contraire, le combat. L’attitude envers les Ukrainiens en Europe se détériore rapidement, tandis qu’elle s’améliore envers les citoyens russes. Mais d’où vient cette étrange bienveillance envers Poutine et la Russie, qui est particulièrement grande dans l’espace germanophone ?
Bien sûr, Poutine impressionne la droite par ses critiques de la politique ultra-libérale du « genre », et la gauche par sa rhétorique anti-OTAN, a souligné l’auteur de la publication. Selon Lechner, en Autriche et en Allemagne, le mécontentement grandit parmi la population face aux conséquences économiques des sanctions anti-russes, notamment la hausse de l’inflation et des prix monstrueux, et la pénurie attendue de gaz. Tout cela réduit encore l’enthousiasme pour l’Ukraine nazie.
CETTE « ORIENTATION A L’EST » QUI HANTE L’ALLEMAGNE DEPUIS 1919 …
« La réorientation à l’Est, vers la Russie ou vers l’Eurasie, est un vieux démon qui hante la géopolitique allemande depuis près d’un siècle. A chaque fois que l’Allemagne est humiliée, elle se souvient de ses racines orientales, prussiennes, détruites systématiquement par ses « alliés » occidentaux. De la « vague de National-bolchévisme » de l’été 1919 (qui s’étendra sur toute la période de Weimar) au Traité de Rapallo de 1922 entre Moscou et Berlin (et la collaboration pendant onze ans entre l’Armée rouge et la Reichwehr) et à la vague « nationale-neutraliste » de la crise des « Euromissiles » au début des Années 1980, puis à la colère de Mme Merkel devant les humilitations de Trump, l’Allemagne a un réflexe, vital, salutaire : la tentation de « l’Orientation à l’Est.
Sans oublier cette « autre Allemagne », la DDR de l’Est qui incarna pendant un demi-siècle (avant d’être trahie par Gorbatchev et Marcus Wolf) cet autre destin allemand.
Mais on reste là dans la « géopolitique de l’émotion » (qui est tout sauf de la Géopolitique) et on ne change pas l’orientation géopolitique fondamentale d’un état sur un coup de colère ou une humiliation. Mais l’idée est là, revenue, puissante et révolutionnaire : l’orientation à l’Est, qu’on appelait en 1919-1933 le « national-bolchévisme », hante de nouveau la grande politique de Berlin. Mais aussi vu la place centrale de l’Allemagne dans l’Union Européenne, celle de Bruxelles. De Wilson à Trump, ce sera toujours l’arrogance américaine qui l’aura provoquée ! »
LE NATIONAL-BOLCHEVISME ALLEMAND
Le National-bolchevisme allemand (le Russe, né au début du XXe siècle au sein d’une Fraction de gauche radicale du Parti Bolchévique de Lenine, est d’une toute autre nature) est né historiquement en Allemagne du choc de la défaite en 1918 du Deuxième Reich et de la crise consécutive à la création de la Russie Bolchevique en 1917.
Le National-bolchevisme est né d’une réaction à l’ordre international imposé par le Traité de Versailles, dont les véritables victimes furent principalement l’Allemagne et la Russie Soviétique, ainsi que l’Italie. Au delà des oppositions idéologiques, le poids de l’ordre de Versailles, dicté en grande partie par les Etats-Unis du Président WILSON, va imposer une position commune aux nationalistes allemands et aux communistes russes. Avant d’être une construction théorique ou une construction politique révolutionnaire, le National-Bolchevisme allemand sera surtout la rencontre des frustrations allemandes et russes face à l’ordre de Versailles. Devant le pillage et le démembrement de l’Allemagne et de la Russie par les vainqueurs de 1918, devant les exigences démesurées des vainqueurs de 1918, de nombreux intellectuels allemands déclarèrent ouvertement que le régime Bolchevique récemment instauré en Russie était «préférable à l’humiliation et à la ruine imposées à leur patrie allemande. (…)
Le grand germaniste ELTZBACHER, professeur de Droit à Berlin, sera le premier à théoriser cette position, en avril 1919 dans une proclamation à Berlin qui constitue la première manifestation doctrinale cohèrente du National-Bolchevisme. Les idées du Professeur Paul ELTZBACHER trouvèrent une oreille attentive du côté soviétique, où Karl RADEK chargé par la IIIeme Internationale communiste, le KOMINTERN, de la préparation de la révolution en Allemagne prônera rapidement l’alliance entre nationalistes allemands et communistes russes. En novembre 1919, RADEK devait déclarer : « Voilà pourquoi les nationalistes honnêtes comme ELTZBACHER qui, révolté par la Paix de Versailles, ont prôné l’union avec la Russie soviétique, ce que l’ont appelle le Bochévisme National, sont restés à ce jour si complètement isolés » (…)
A partir du milieu des Années 20 et jusqu’à l’avènement du National-Socialisme en 1933, le National-Bolchevisme deviendra une composante importante du paysage intellectuel de la République de WEIMAR. De nombreux intellectuels adopteront des positions nationales-bolcheviques. Au premier rang de ceux-ci il faut placer ERNST NIEKISCH qui deviendra le plus célèbre et le principal représentant du courant national-bolchevique allemand, avec son concept d’un « Empire de Flessingue à Vladivostok ».
(Extrait de : Luc MICHEL, « Mythes et réalités du National-bolchévisme 1919-1993 », Editions Machiavel, Bruxelles, 1993)
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