Par Salim Lamrani

Résumé : Suite à l’avènement de la Révolution cubaine en 1959, les États-Unis se sont opposés au programme de transformation socio-économique entrepris par les nouvelles autorités et ont adopté une politique hostile. Loin de redouter un rapprochement entre La Havane et Moscou, Washington a au contraire délibérément poussé l’île vers l’Union soviétique, dans le but de pouvoir ainsi justifier les mesures drastiques que l’administration Eisenhower s’apprêtait à adopter contre Cuba, à savoir les sanctions économiques et l’isolement du pays. L’épisode de la vente d’armes est illustratif de cette volonté de contraindre Fidel Castro à solliciter l’aide du bloc socialiste.

Introduction

            Le renversement de la dictature militaire de Fulgencio Batista et l’avènement de la Révolution cubaine de 1959 ont bouleversé les relations bilatérales entre Washington et La Havane, dans un contexte géopolitique marqué par la guerre froide entre les deux grandes puissances. De république imparfaite soumise, subordonnant ses intérêts nationaux à ceux du puissant voisin, Cuba s’est transformée en nation revendiquant de manière affirmée son indépendance et sa souveraineté, suscitant par la même occasion des tensions extrêmes avec l’administration Eisenhower, dont la conduite hostile a contraint l’île à tisser une alliance stratégique avec l’Union soviétique.

            En réalité, loin de redouter un tel rapprochement de l’île avec Moscou, les États-Unis ont au contraire délibérément poussé La Havane à se tourner vers la seule alternative qui leur permettait de faire face aux dangers représentés par la politique étrangère de Washington. Il y avait une raison à cet objectif : justifier les mesures drastiques qu’ils s’apprêtaient à prendre contre Cuba, à savoir les sanctions économiques. En effet, Washington était résolument opposé au processus de transformation sociale radical entrepris par les autorités gouvernementales de l’île, dont la réussite potentielle pouvait créer un dangereux précédent auprès des autres pays du tiers-monde partageant des réalités similaires et remettre en cause son hégémonie.

            L’épisode de la vente d’armes est illustratif de cette réalité. En effet, en 1959, le gouvernement de La Havane, menacé par la République dominicaine du Généralissime Trujillo et les exilés cubains héritiers de l’ancien régime, se tourna d’abord vers les États-Unis pour remplacer son matériel militaire obsolète, en vain. Par la suite, Cuba s’adressa aux puissances de l’Europe occidentale pour acquérir les armements nécessaires à sa défense, essuyant à chaque fois un rejet motivé par la pression diplomatique exercée par le Département d’État auprès des pays du Vieux continent. Lorsque la Belgique, dans une réaffirmation de sa souveraineté, décida de vendre des armes à Cuba, une explosion meurtrière dans le port de La Havane détruisit la cargaison. L’objectif recherché par les États-Unis était clair : contraindre l’île à solliciter de l’aide à l’Est. 

Article complet : https://journals.openedition.org/etudescaribeennes/25686

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