Par Faouzia Zebdi-Ghorab

L’hôpital qui se moque de la charité… la poutre et la paille… qui vole un œuf, vole un bœuf… à bon chat bon rat… là-bas si j’y suis…. Quelle que soit la belle formule que vous choisirez, elle sera loin de traduire le déversement médiatique dont fait l’objet la Türkiye à la veille des élections présidentielles du 14 mai 2023.

La Türkiye[1] est un pays libre et souverain, il serait donc mal venu, en ce qui me concerne du moins, de me prononcer sur la « teneur » des candidats, sur les futurs suffrages, et autres pronostics hâtifs. De la même façon, les débats actuels sur une éventuelle réforme constitutionnelle ou la question de l’adhésion à l’Union européenne… sont LEURS débats et non les miens. Rappelons seulement — âmes sensibles s’abstenir− que, dès 2003 :

– Recep Tayyip Erdogan amende la Constitution pour que le chef de l’État soit directement élu par les citoyens.

– Le même Erdogan œuvre pour une intégration de la Türkiye au sein de l’Union européenne avec tout ce que cela implique comme contraintes et conformité aux normes européennes[2] drastiques.

– C’est encore lui qui est à l’origine de réformes économiques nationales sans nom qui propulsent la Türkiye au 7e rang des plus grandes économies du monde ; réformes qui font de la Türkiye une destination touristique très en vogue, classée en tête de nombreux sites touristiques, notamment pour ses stations balnéaires dont les prix défient toute concurrence. Le nombre de touristes que la Türkiye a accueillis en 2022 a dépassé les 51 millions de touristes. 6e pays le plus visité après : la France, les USA, l’Espagne, la Chine et l’Italie, la Türkiye est devenue le 3e plus grand marché touristique du monde, avec 11 sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO. Elle était encore, en 2020 au 15e rang du classement.

Mais me dira-t-on : tu ne réalises pas : tu nous parles de tourisme, de plages et de CHIFFRES ! Mais les retombées, les enjeux, les conséquences, la démocratie, la liberté, les dangers, l’apocalypse… le loup dans la forêt… et j’en passe.

Parlons peu et parlons bien comme diraient tous les amoureux de la liberté européaniste, dont je fais bien évidemment partie. Les médias sont les leaders des brassages de vent hors sol, théoriques, idéels, quand ce ne sont pas de simples opinions ou conjectures sans fondement. Pour donner un peu le ton, voici quelques titres pris au fil du déversoir médiatique :

– Élections turques : des médias sous influence…

– Turquie : Erdogan vacille…

– En Turquie, le contrôle des médias comme arme du pouvoir…

– Élection présidentielle en Turquie : est-ce la fin d’un règne ?

– Quand les femmes ont eu le droit de vote en Turquie ?

– Erdogan…. installé au sommet du pouvoir 

– Erdogan devra affronter pour la première fois une opposition unie après 20 ans de pouvoir.

Ce dernier titre, vous l’aurez compris, crée volontairement la confusion entre son poste de président qui a duré 8 ans, et ses autres investitures, dont celles de 1er ministre.Auquel cas autant dire que Mitterrand est resté rivé à ce même sommet durant 47 années. Mais ne hurlons pas avec les loups en utilisant les mêmes procédés arithmétiques, pas très glorieux. Mais bon, François Mitterrand détient quand même un sacré record de longévité avec ces 14 ans de mandat présidentiel ! De plus, il ne semble pas que son bilan économique ait marqué l’histoire de l’économie française ni affolé les baromètres de la bourse et les tendances du CAC 40. Le tout aussi démocrate et républicain Jacques Chirac a régné quant à lui 11 ans, 11 mois et 29 jours. Erdogan, moins démocrate, et moins républicain comme chacun sait, exerce le pouvoir depuis 8 ans.

Je suis profondément fière de cette liberté d’expression qui permet à tout un chacun de parler librement. Et comme aurait dit Voltaire « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire ». Mais reconnaissez que certains confondent allégrement « parler librement » et « dire n’importe quoi ».

« LA TURQUIE, UNE PUISSANCE ÉCONOMIQUE DYNAMIQUE DEVENUE INCONTOURNABLE », peut-on lire sur le site du sénat[3].  Première économie du Moyen-Orient, et membre du G20, la Turqiye est actuellement classée dix-septième en tant que l’une de plus grande économie du monde, avec un PIB de 736,716 milliards de dollars. Elle prévoit de passer, en 2023, au 10e rang, et talonner ainsi la France. Le dynamisme économique de la Türkiye est une réalité, mais encore une fois, les chiffres valent mieux que mille discours, dirai-je pour paraphraser un petit-grand homme français.

La 1re réserve de change est détenue par la chine avec 3133 milliards de dollars. La France est 14e après l’Inde, la Corée du Sud, le Brésil  ou l’Italie ! La Türkiye est quant à elle, 32e avec 73 milliards de dollars. Quant au PIB turc, il est juste impressionnant quand on le compare à celui des puissances européennes. Les USA se classent les 1ers avec 25 346,805 Milliards de dollars[4]. La France tient la 7place après le Japon, l’Inde, l’Allemagne et la Grande-Bretagne ! La Türkiye, quant à elle, est 19e, avant la Suisse, la Pologne, la suède, la Belgique, l’Irlande, la Norvège, l’Autriche, le Danemark, etc.

Et pour finir par les choses qui fâchent, parlons de la dette.

Pour 2022, 5 pays de l’UE ont atteint le plafond critique de 110 %. La Grèce détient de loin, le plus fort taux d’endettement de l’Union européenne avec 171,3 % de son PIB, devant l’Italie (144,4 %), le Portugal (113,9 %), l’Espagne (113,2 %). Vient ensuite la France endettée de 111,6 % de son PIB, soit près de 3 000 milliards d’euros !

Dernière nouvelle en date, la Türkiye vient de détrôner les USA, en devenant le 1er exportateur mondial de drones militaires.

La Türkiye est membre de l’OTAN, de l’OCDE, de l’OSCE, du Conseil de l’Europe mais pas de ‘UE.  Au niveau des faits et des chiffres, pourquoi accepter dans l’UE, la Bulgarie ou la Roumanie, et pas la Türkiye ?

Quoiqu’il en soit la Türkiye continue son petit bonhomme de chemin quand les États européens obéissent à des « intérêts ? » dictés par l’Europe ; intérêts qui sont rarement ceux de leurs populations respectives. Peut-être manque-t-il à la Türkiye sa Ursula Von Der Leyen ? Qu’à Dieu ne plaise !

Cil est assez facile de dire qu’Erdogan a fait des lois liberticides… qu’il est totalitaire. Mais pour être crédible, il faut donner quelques exemples.

Mais peut-être parle-t-on de la loi de contrôle d’internet. Mais la France n’a-t-elle pas interdit des chaines d’information ? N’a-t-elle pas censuré des films ou des livres, interdit des chansons ou des spectacles ?

……

Puissance à la fois orientale et occidentale, ce pays a une économie, mais aussi une épaisseur historique fondée sur une diplomatie qui s’est exprimée de façon tactique, depuis Soliman le magnifique notamment.

Même le cinéma turc dans certains milieux a supplanté le cinéma français. Au point que certains adeptes des feuilletons turcs sont devenus familiers avec la langue turque. Ce qui est, il faut le reconnaitre, bien méritoire.

Loin de moi l’idée de dire que la Türkiye est un paradis, et encore moins un paradis fiscal. Mais un minimum d’impartialité aurait imposé que le bilan de ces deux dernières décennies soit établi avec un peu plus de discernement. De même l’interprétation des sondages dont on ne connait généralement pas la source, et qui donnent systématiquement Erdogan en difficulté.

Pourquoi ce déversement qui laisse assez perplexe ? Pourquoi ce quasi-acharnement ? Pourquoi cette haine à peine masquée ? Pourquoi cette partialité flagrante ? Quelles sont les véritables raisons de ce traitement incompréhensible ? Je vous laisse le soin de répondre à la question.

Mondialisation oblige, je finirai par une citation chinoise qui dit que « peu importe que le chat soit noir ou blanc pourvu qu’il attrape les souris » ou dit plus simplement : « QUE LE MEILLEUR GAGNE »


[1] La République de Türkiye a changé son nom officiel (auparavant République de Turquie) le 26 mai 2022, selon une lettre du ministère des Affaires étrangères du pays adressée au secrétaire général des Nations Unies

[2] Notamment l’interdiction pour les pays membres de créer leur propre monnaie ou d’acheter ou de vendre de l’or sans l’autorisation de la banque centrale !

[3] https://www.senat.fr/rap/r12-716/r12-716_mono.html#toc4

[4] Données de la Banque mondiale, 2022 pour l’année 2021

Faouzia ZEBDI-GHORAB 

Source : auteure

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