La France a déclaré mercredi 4 janvier 2023 qu’elle enverrait des chars légers AMX-10 RC de fabrication française à l’Ukraine, les premiers chars d’un pays d’Europe occidentale, après un appel téléphonique dans l’après-midi entre le président français Emmanuel Macron et le président ukrainien Volodymyr Zelensky. [AP Photo/Jeremy Bessat/Armee de Terre]
Par Alexandre Lantier
Alors qu’il veut diminuer le montant total des retraites de 13 milliards d’euros par an, Macron veut augmenter les dépenses militaires de 118 milliards dans les six prochaines années. Vendredi, à Mont-de-Marsan, il a annoncé une augmentation de 40 pour cent des crédits pour les forces armées, à 413 milliards d’euros pour 2024-2030.
Macron et tous les pays de l’OTAN dépensent des milliards pour faire la guerre à la Russie en Ukraine, et ce projet révèle le mépris de l’élite dirigeante envers l’opinion et les droits sociaux des travailleurs. 80 pour cent des Français rejettent la réforme des retraites de Macron. Mais il veut transférer des centaines de milliards d’euros des retraités aux banques et au commandent militaire, avec l’argument qu’une escalade majeure des guerres est inévitable.
Ceci souligne que pour arrêter la dévastation des niveaux de vie par l’austérité et l’inflation nécessite la construction d’un mouvement contre les guerres impérialistes de l’OTAN.
Alors que l’OTAN est à deux doigts de lancer une guerre mondiale contre la Russie, Macron a exigé que la France se prépare à de nouvelles escalades explosives et des guerres de haute intensité. « Il ne faut jamais être en retard d’une guerre. Nous devons donc avoir une guerre d’avance », a-t-il dit, et préparer la France à « des guerres plus brutales, plus nombreuses ».
Il a annoncé une modernisation générale des armes nucléaires françaises : ogives, missiles, et des avions et sous-marins qui les lanceraient. Il a dit, « La dissuasion est un élément qui fait de la France un pays différent en Europe. Nous mesurons à nouveau, en analysant la guerre en Ukraine, son importance vitale. Elle mérite les efforts considérables que nous lui consacrons ».
Ce budget augmente les vastes ressources déjà consacrées à l’espionnage et à la guerre de drones. Macron a annoncé une augmentation de 60 pour cent des budgets du renseignement militaire et de la cyberguerre, l’augmentation de la flotte de drones, et la création de nouveaux systèmes de défense aérienne pour détecter les drones ennemis, qui peuvent échapper aux radars traditionnels. Il a prévu la construction d’un nouveau porte-avions, le remplacement de tous les chasseurs Mirage par des Rafale, et l’achat de nombreux véhicules blindés Scorpion.
Macron a insisté que l’industrie française doit être prête à produire de larges quantités d’armes lourdes pour des guerres extérieures. Appelant à « construire en conséquence nos stocks de munitions, notre logistique, notre soutien », il a dit : « Nous devons être capables d’agir plus vite, d’être plus réactifs : en renforçant l’échelon en national d’urgence et disposer ainsi de moyens nécessaires pour une intervention sous court préavis même loin de la métropole. »
Il a déclaré que la France doit pouvoir rapidement envoyer 20.000 en opération extérieure, prêts à mener des manœuvres de guerre à haute intensité.
Il a conclu en annonçant qu’il enracinerait le pouvoir du commandement militaire dans la vie officielle. Comparant les lois de programmation militaire de 2019-2023 et 2024-2030, il a dit : « Au total, ces deux lois de programmation militaire auront donc conduit à un doublement des budgets de nos armées. … ce sont des moyens considérables qui amplifient un effort de défense dont la dynamique est sans précédent depuis cinq décennies. »
Le doublement de l’effort de défense, à un niveau sans précédent depuis la guerre coloniale en Algérie en 1954-1962, est selon Macron « un changement profond qui sera ensuite irréversible. »
Le non-dit antidémocratique qui sous-tend la position de Macron est évident : si les revendications sociales et politiques des travailleurs nuisent à sa décision « irréversible » de donner des centaines de milliards d’euros aux officiers, le nationalisme militaire exigera de les écraser.
Sa présentation du réarmement français en tant que mesure défensive pour défendre le sol français est malhonnête. D’abord, Macron lui-même indique qu’il veut fabriquer des armes offensives utilisées dans des conflits extérieurs, loin des frontières françaises. Ensuite, la France comme les USA a déclaré qu’elle accepte d’être la première puissance à utiliser l’arme nucléaire dans une guerre ; ainsi l’appel à construire ces armes vise non pas à dissuader mais à menacer d’autres pays.
De plus, il est de plus en plus clair que le concept de « dissuasion », qu’un pays peut empêcher des attaques sur son sol en développant des armes nucléaires, est à présent caduc face à la montée de la guerre impérialistes. La Russie a un des plus grands arsenaux nucléaires du monde. Mais l’OTAN arme l’Ukraine sur les frontières de la Russie, l’aide à attaquer des régions russophones telles que la Crimée, que Moscou déclare être partie intégrante de son territoire.
La Troisième Guerre mondiale qui s’annonce est le produit de trois décénnies de guerre impérialiste depuis la dissolution stalinienne de l’Union soviétique en 1991. L’OTAN était l’agresseur dans ces conflits, attaquant des pays dont l’Irak, la Yougoslavie, l’Afghanistan, la Libye, la Syrie, et le Mali. Ces guerres ont collectivement fait des millions de victimes. L’invasion de l’Ukraine par le régime capitaliste russe était sans doute réactionnaire. Mais elle suit le coup pro-OTAN à Kiev de 2014, qui a installé un régime d’extrême-droite ukrainien qui a attaqué des régions russophones d’Ukraine.
En 2019, Macron a critiqué la politique américaine envers la Russie, en déclarant que l’OTAN était en « mort cérébrale » car elle risquait une guerre avec la Russie. Il a dit : « Que les États-Unis soient très durs avec la Russie, c’est un surmoi, administratif, politique, historique. »
Après trois années de montée des conflits de classe et de crise économique depuis le début de la pandémie de Covid, Macron a retourné sa veste. Se lançant dans une guerre contre la Russie, il a récemment promis d’envoyer des chars français à Kiev pour attaquer la Russie.
La réforme des retraites voulue par Macron démontre comment la politique impérialiste de pillage à l’extérieur est indissolublement liée au pillage des travailleurs à l’intérieur. La destruction des retraites a vocation, pour les banques, de libérer de vastes ressources pour la guerre et pour augmenter les profits et les avantages fiscaux des grandes entreprises.
La réforme proposée par Macron déclare que son but est de éduire le taux d’imposition des entreprises. En effet, elle déclare : « Cette maîtrise de la dépense permettra, sans remettre en cause l’objectif de normalisation des comptes publics, de poursuivre la stratégie de baisses des prélèvements obligatoires … Il sera poursuivi, notamment, avec la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises sur deux ans, portée par le projet de loi des finances de 2023. »
Les travailleurs ne peuvent pas lutter contre l’austérité et la guerre en laissant leurs luttes aux mains des appareils syndicaux et de leurs alliés politiques de pseudo-gauche, tels que le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) petit-bourgeois d’Olivier Besancenot. En effet, le NPA comme l’appareil de la Confédération générale du travail (CGT), a explicitement applaudi la guerre de l’OTAN en Ukraine.
Dans leur seul article sur le budget militaire français, le site Web Révolution permanente, lié au NPA, appelle les travailleurs et les jeunes à se ranger derrière les appareils syndicaux dans les manifestations contre la réforme des retraites. Il écrit : « cette nouvelle annonce de Macron sonne comme une provocation contre tous les secteurs mobilisés. A nous de laver l’affront dans la rue, les lieux de travail et d’étude, en faisant ravaler sa réforme à Macron et en refusant la surenchère militaire et réactionnaire qu’il veut nous imposer. »
En réalité, stopper les attaques sociales visant les travailleurs nécessite de stopper la montée des guerres impérialistes que les réformes de Macron ont vocation à financer. Il ne suffit pas de « refuser» cette escalade. Il faut construire un mouvement de masse des travailleurs et des jeunes, indépendant des appareils syndicaux nationaux et des partis petits-bourgeois pro-guerre, et qui s’oppose à l’impérialisme sur la base d’une lutte ouvrière internationale pour le socialisme.
Source : WSWS
https://www.wsws.org/fr/…
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