Par Robert Inlakesh
Israël va connaître une cinquième élection en quatre ans, et l’ancien Premier ministre Benjamin Netanyahou pourrait faire son retour.
Par Robert Inlakesh
Robert Inlakesh est un analyste politique, journaliste et documentariste actuellement basé à Londres. Il a vécu dans les territoires palestiniens occupés, où il a réalisé plusieurs reportages, et travaille actuellement avec Quds News. Il a notamment réalisé le documentaire « Le casse du siècle : le plan catastrophique de Trump pour la Palestine ».
Source : RT, le 27 juin 2022
Traduction : lecridespeuples.fr
L’improbable coalition gouvernementale israélienne composée de huit partis a pris la décision de se dissoudre lundi dernier, ouvrant ainsi la voie à un cinquième tour d’élections en quatre ans seulement. Des élections au cours desquelles le leader de l’opposition israélienne, Benjamin Netanyahou, envisage un retour en force et met en lumière les vulnérabilités intérieures de Tel Aviv que ses ennemis pourraient chercher à exploiter.
En juin 2021, un gouvernement de coalition israélien sans précédent a prêté serment après une période ténue de deux ans, au cours de laquelle quatre élections nationales avaient eu lieu. Au centre du chaos politique israélien a toujours été l’ancien Premier ministre Benjamin Netanyahou et un an plus tard, rien ne semble avoir changé. Le Premier ministre israélien Naftali Bennett, du parti d’extrême droite Yamina, a décidé d’en finir et de dissoudre son gouvernement, cédant son titre à son partenaire de coalition Yaïr Lapid, qui prêtera bientôt serment en tant que Premier ministre par intérim, en attendant un nouveau cycle d’élections.
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Ce qu’il faut comprendre du désordre politique israélien, c’est que la Knesset israélienne a toujours été et continue d’être un lieu profondément divisé : il n’y a jamais eu de gouvernement à parti unique, seulement des coalitions. La coalition de huit partis de l’année dernière était peut-être la plus diversifiée sur le plan idéologique. Elle a obtenu la mince majorité de 61 sièges nécessaire pour former un gouvernement en faisant des compromis politiques importants, tels que l’admission d’un parti arabe au gouvernement pour la première fois dans l’histoire d’Israël.
Bien que de nombreux Israéliens aient initialement soutenu le gouvernement de coalition, celui-ci s’est rapidement avéré inefficace et faible sur de multiples fronts, en grande partie à cause d’un bloc d’opposition très engagé dirigé par Netanyahou et son parti de centre-droit, le Likoud, et aussi parce que les partis de la coalition étaient en désaccord sur de nombreux points. La goutte d’eau qui a fait déborder le vase est arrivée au début du mois, lorsque le gouvernement israélien n’a pas réussi à faire adopter un projet de loi d’urgence qui permet aux colons israéliens illégaux d’être régis par le droit civil, tandis que les Palestiniens vivant dans les mêmes territoires sont soumis au droit militaire israélien. Ce projet de loi est normalement renouvelé tous les cinq ans et est considéré comme l’un des textes législatifs les plus faciles à adopter, mais en raison du refus de l’opposition israélienne de voter en sa faveur, la coalition gouvernementale elle-même n’a pas pu réunir suffisamment de voix à la Knesset pour le faire passer.
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Dès le départ, Netanyahou a traité les partis de droite de la coalition de vendus, affirmant que la gauche, ainsi que le parti islamiste Raam, avaient comploté intérieurement une prise de pouvoir anti-droite. Et ce, bien que la coalition soit composée principalement de partis d’extrême droite, centristes, islamistes et de centre-droit, seuls deux d’entre eux ayant une tendance à la gauche. Alors que des personnalités politiques israéliennes populaires de droite, telles que le ministre de la justice Gideon Saar, le ministre des finances Avigdor Lieberman et Naftali Bennett lui-même, avaient toutes reçu le soutien public de leurs fidèles politiques pour leurs positions anti-Netanyahou, les résultats des prochaines élections pourraient prouver qu’elles se sont suicidées politiquement en rejoignant un gouvernement avec des centristes et un parti arabe.
S’il est vrai, comme on le suppose, que l’ancien Premier ministre Naftali Bennett et d’autres membres de l’aile droite de sa coalition dissoute seront confrontés à un retour de bâton dans les urnes, Benjamin Netanyahou pourrait avoir réussi un coup de force majeur. Un coup qui pourrait lui assurer, ainsi qu’à ses alliés, suffisamment de sièges pour former un gouvernement de coalition plus tard dans l’année.
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Les Palestiniens sont souvent laissés de côté dans tout cela. Ils ne verront pas beaucoup de changement sur le terrain, quel que soit le gouvernement qui sera mis en place, mais leurs représentants politiques chercheront à tirer parti de la crise de Tel Aviv. Le Hamas, le parti politique palestinien le plus populaire qui dirige la bande de Gaza, cherchera à profiter des faiblesses des élites politiques israéliennes pour tenter d’alléger le blocus [qui est un acte de guerre] ou, au contraire, étudiera le moment opportun pour frapper Israël.
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Au cours de l’année écoulée, la coalition israélienne au pouvoir n’a pas maintenu une position unifiée sur la manière d’aborder la question palestinienne. La politique d’Israël en Cisjordanie en est un exemple. Alors que le ministre israélien des affaires étrangères, Yair Lapid, et le ministre de la défense, Benny Gantz, ont opté pour une coopération plus étroite en matière de sécurité avec l’Autorité palestinienne, basée en Cisjordanie, le Premier ministre Bennett a publiquement refusé de les prendre en considération.
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Le président américain Joe Biden a prévu une visite au Moyen-Orient à la mi-juillet, au cours de laquelle il se rendra également au Royaume d’Arabie saoudite, ce qui a suscité des spéculations sur une tentative de normalisation des liens entre Tel Aviv et Riyad. En réalité, il est plus probable que la visite vise à rassembler les pays du Moyen-Orient pour combattre l’influence iranienne dans la région. Maintenant qu’Israël est, de fait, à nouveau sans gouvernement, Joe Biden sera plus susceptible de devoir jouer un jeu d’équilibriste pendant sa visite, en mettant de côté les objectifs politiques sérieux. Tout cela pour dire qu’Israël se trouve actuellement dans une situation de faiblesse en raison de son incertitude politique.
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Source : le Cri des Peuples
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