Par Karine Bechet-Golovko
Le 16 juin doit se tenir la rencontre entre Poutine et Biden, lorsque ce dernier fera sa tournée européenne et globale, puisqu’elle comportera la réunion des différents organes de gouvernance globalisée, tels que le G7, l’UE et l’OTAN. Dans cette démarche, la place des Etats est secondaire, ils viennent se montrer, prendre des notes : Biden vient leur expliquer ce qu’est la « démocratie globale ». Une différence – la Russie. Car la rencontre entre Biden et Poutine est une rencontre bilatérale, entre deux chefs d’Etats, rencontre entre des Etats qui ne peuvent cohabiter dans la vision américaine globalisée de notre monde. C’est bien pourquoi Blinken estime que la coopération à venir entre les deux pays sera possible … si la Russie « change » de cours politique (si elle se soumet) et que Peskov estime qu’il ne faut pas attendre de grandes décisions de cette rencontre. Ce qui finalement serait le mieux dans cette configuration – qu’il ne se passe rien.
Avant sa tournée impériale en Europe, Biden a besoin de marquer le territoire. Pour cela, tout un environnement politico-médiatique est créé. Il sort un article dans le Washington Post, plutôt un article à son nom est publié dans le Washington Post. Rien de nouveau n’en découle, toujours les mêmes laïus : les Etats-Unis sont le centre de la « démocratie globale », ils sont prêts à défendre l’Europe (et elle le paie déjà très cher pour des dangers qui sont créés par les Etats-Unis eux-mêmes – ne prenons pas de risques …), les Etats-Unis doivent gouverner le monde d’une « position de force », ils veulent des relations stables avec la Russie (autrement dit sa reddition) et les deux empêcheurs de tourner en rond sont bien la Chine et la Russie, mais différemment. Le danger représenté par la Chine est commercial et c’est d’ailleurs pourquoi Biden propose que la Chine ne participe pas à l’établissement des règles du commerce mondial – les Etats-Unis s’en chargeront certainement sans problèmes. Au-delà de l’absurdité de la chose, ce discours illustre la vision particulièrement primaire du monde développée par les Etats-Unis globalistes.
Le danger représenté par la Russie est bien autre, il est civilisationnel, politique – dans le sens de la gouvernance de la Cité, de cette Cité globale, de ce village global, qui doit tourner autour d’un seul centre. La Russie, par son existence même (comme l’a rappelé Poutine) l’empêche.
C’est pourquoi, en complément des déclarations attribuées à Biden, Blinken met les points sur les i en précisant les choses, autant qu’il soit possible de le faire et même au-delà :
« Les Etats-Unis sont prêts à des relations stables avec la Russie, si elle change de cours. »
Comprenant lui-même, et affirmant, que cela est peu probable, nous pouvons raisonnablement en déduire qu’une normalisation des relations américano-russes n’est pas à l’ordre du jour pour les Américains. Ce que les Russes comprennent parfaitement et Peskov, le porte-parole du Kremlin a sérieusement baissé le niveau des attentes de cette rencontre : c’est déjà bien de pouvoir se parler en face. Soit. Mais à ce niveau, la discussion n’étant pas un but en soi, des résultats positifs ne sont pas à attendre.
D’ailleurs, bien disciplinée, l’UE entre dans la ronde politico-médiatique pour toucher la Russie sur un point sensible – la Serbie. Le Président du Parlement européen n’a en effet rien trouvé de mieux que de lancer l’idée d’un nouvel élargissement de l’UE vers l’Est, en intégrant l’Albanie, le Monténégro, la Macédoine du Nord et … la Serbie. L’UE qui est déjà en crise, économiquement incapable d’avoir un effet de relance sur les économies nationales. L’UE, où les questions d’immigration et de sécurité provoquent l’implosion des sociétés européennes, enfin ce qu’il en reste. Vouloir intégrer des pays économiquement faibles et en plus pour certains, comme l’Albanie, posant de réels problèmes de sécurité, c’est en effet « une chance ».
Quant à l’OTAN, elle s’inquiète. Elle s’inquiète du rapprochement de la Russie avec la Chine, elle s’inquiète de la coopération (pourtant naturelle) entre la Russie et la Biélorussie. Elle s’inquiète … mais n’a rien à proposer.
La rencontre entre Biden et Poutine s’annonce effectivement sous de beaux jours …
Source : Russie politics
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