Par Karine Bechet-Golovko

Après avoir été accusée d’explosions en série de dépôts d’armes en République Tchèque, puis en Bulgarie, le ministre russe des Affaires étrangère Sergueï Lavrov se demandait de quoi encore la Russie n’était pas coupable. Le Parlement européen, hier dans une résolution non obligatoire, lui a répondu : la Russie est a priori coupable de tout ce qui ne fonctionne pas comme prévu dans le monde, mais surtout elle est coupable d’exister. L’UE vient encore de faire preuve d’une diplomatie de haut vol, ce qui n’est pas étonnant après ses derniers exploits, en Russie ou en Turquie. Mais quel est l’intérêt des pays de l’Europe de l’Ouest de suivre l’hystérie anti-russe, et anti-européenne, lancée par l’Europe de l’Est, à la pointe des intérêts atlantistes ?

La Russie est l’ennemi, une fois n’est pas coutume. Après que la République Tchèque l’ait accusée d’avoir fait exploser un dépôt d’armes et que la valse des diplomates ait été jouée (voir notre texte ici), la Bulgarie a repris le flambeau et a accusée, elle aussi, la Russie d’explosions dans des usines d’armement. Ainsi, entre 2011 et 2020, 4 usines d’armes auraient subies des explosions et 6 Russes en seraient responsables. Nous allons certainement retrouver nos incontournables Petrov et Bashirov, les Dupont et Dupont de l’espionnage russe fantasmé à la mode Tintin, dans leur tournée européenne, avec des petits clones pour grossis les rangs. Evidemment, un diplomate russe a été déclaré persona non grata, la valse continue, la solidarité européenne oblige.

Pourtant, dès le départ, l’histoire bulgare bugue. La compagnie EMKO à laquelle appartient les usines dans lesquelles des explosions auraient eu lieu dément la version officielle. Selon son propriétaire, il y a eu par le passé un seul incident d’explosion, le 12 novembre 2011, mais avec des armes venant d’ailleurs de République Tchèque, et les services d’enquête n’ont alors rien trouvé de particulier et clos l’affaire. Finalement, la Bulgarie s’est adressée aux services d’enquête russes pour avoir leur collaboration dans l’enquête, même s’ils restent persuadés que ces 6 mystiques Russes sont impliqués … Le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré étudier la question.

Cette hystérie générale met à bout la patience du Kremlin :

« Tout ce que fabriquent les Tchèques, auxquels se sont joints les Bulgares, comment au nom d’une fausse solidarité se joignent à eux les Baltes et d’autres, nous n’allons pas le supporter, nous ne le supportons déjà plus et le faisons déjà savoir.« 

Comme le souligne Lavrov avec justesse, l’UE devrait plutôt contrôler la sitution autour des ventes d’armes par les pays membres de cette organisation et vérifier s’il n’y a aucune violation des conventions internationales en la matière. Et de remarquer avec humour :

« C’est déjà une bonne chose que l’on ne nous accuse pas de l’assassinat du Grand Duc Ferdinand, qui a servi de déclencheur à la Première Guerre mondiale, même si tout y conduit !« 

En effet, de quoi la Russie n’est-elle pas responsable ? A cette question, le Parlement européen vient d’apporter la réponse : la Russie est responsable, avant tout, d’exister.

Dans une résolution de 10 pages, dont le texte mérite d’être lu par un psy, le Parlement européen accuse en bloc la Russie : d’oser déployer ses forces armées sur son territoire face aux exercices de l’OTAN à ses frontières, de la guerre civile en Ukraine qui dure depuis des années après le Maîdan américain, de ne pas exécuter les Accords de Minsk auxquels elle n’est pas partie mais garante, de ne pas lutter contre la corruption et donc d’avoir incarcéré pour escroquerie Navalny, sans oublier les Skripal et tous ceux qui survivent à ces armes chimiques de masse qui ne tuent plus, les explosions en République tchèques, etc. Bref, la Russie est l’ennemi, l’incarnation du Mal absolu, un pays terroriste qui empoisonne, produit des explosions. Ce qui doit certainement justifier l’appel à soutenir militairement l’Ukraine au point 4 …

Deux points sont particulièrement significatifs dans cette résolution – et de la haine de l’UE pour la Russie, et de son impuissance.

En ce sens, le point 1.Q est un véritable cri de haine :

« considérant que la Fédération de Russie constitue non seulement une menace extérieure pour la sécurité de l’Europe, mais qu’elle mène également une guerre intérieure contre sa propre population sous la forme d’une répression systématique de l’opposition et d’arrestations en pleine rue« 

La Russie est un ennemi, pas uniquement pour les autres pays, mais aussi pour elle-même. Nous pouvons être certains que si la Russie était plus petite, elle aurait déjà subi le sort peu enviable de tous les pays détruits au nom d’une Opération de démocratisation extérieure. Mais la Russie n’est pas aussi facilement digérable et l’absurdité suicidaire des sanctions proposées, si « invasion de l’Ukraine », souligne la rage impuissante de l’UE. Voir le point 8 de cette résolution :

« souligne que, dans l’hypothèse où ce déploiement militaire se transformerait en une invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie, l’Union doit faire clairement savoir qu’une telle violation du droit et des normes internationaux se paierait au prix fort; insiste donc pour que, en de telles circonstances, les importations de pétrole et de gaz russe dans l’Union soient immédiatement stoppées, que la Russie soit exclue du système de paiement SWIFT »  

Peut-on sérieusement penser que les pays européens puissent se passer totalement du gaz et du pétrole russe ? Dans ce cas, il faut effectivement continuer les mesures de confinement, de fermeture des magasins, de désindustrialisation, pour que l’économie européenne soit complètement écrasée et les sociétés détruites. Sinon, l’Europe ne sera plus en mesure d’assurer un fonctionnement normal.

C’est à réfléchir …

Source : Russie politics
http://russiepolitics.blogspot.com/…