Par Patrick Le Hyaric
Covid ou pas, la Commission européenne n’a pas de cœur. Sous couvert de «secret des affaires», Mme von der Leyen, présidente de ladite Commission, cache la nature des contrats avec les firmes productrices du vaccin anti-Covid. Sa soumission à l’égard de ces oligopoles pharmaceutiques conduit à les laisser mener la danse et à livrer les vaccins comme bon leur semble.
Ainsi, la firme AstraZeneca ne projette de livrer que 40 millions de doses ce trimestre au lieu des 120 millions inscrites dans le contrat. Un bras d’honneur alors que l’Europe compte déjà plus de 500.000 décès. Ajoutons que ces mêmes institutions européennes, qui ont financé l’an passé à hauteur de 2,3milliards d’euros les laboratoires pour la recherche sur le vaccin, bloquent depuis des mois les demandes relatives à la levée des droits de propriété intellectuelle de l’Inde et l’Afrique du Sud soutenues par une centaine de pays. Plusieurs sources convergent pour affirmer que la plupart des habitants des pays africains ne pourront être vaccinés avant… 2023. Dans le droit fil de ses prédécesseurs, l’actuelle présidente de la Commission sait pourquoi elle est là: servir d’abord le capital avant les êtres humains. Les oligopoles de la pharmacie sont aux anges. Pfizer vient d’annoncer 12milliards d’euros de chiffre d’affaires et au moins 20% de marges cette année grâce au vaccin. Pendant ce temps, les diverses mutations du virus font planer le risque d’une réinfection planétaire. La nouvelle réunion de négociation sur les brevets sous l’égide de l’Organisation mondiale du commerce, le 23 février prochain, est très importante. Des interventions, sous différentes formes, auprès du gouvernement et des institutions européennes, pourraient faire bouger les choses.
Alors que, depuis quelques semaines, la question de la dette accumulée pour empêcher l’effondrement de pans entiers de l’économie est brandie pour tétaniser tout mouvement social, les États attendent d’entrevoir le premier euro du fameux paquet historique européen de 750 milliards. Encore que, sur cette somme, 360 milliards sont des prêts, donc de la dette qui servira à assouvir la voracité des marchés financiers. En effet, les mécanismes actuels d’endettement servent essentiellement à cela: nourrir les spéculations financières et boursières que les populations payent au prix fort sous forme de perte de leurs entreprises publiques ou de destructions de leurs conquis sociaux. Il n’a d’ailleurs pas fallu attendre longtemps! Mardi dernier, le Parlement européen votait le règlement sur ce plan de relance. Une multinationale qui en touchera les subsides y aura accès sans condition pour les salaires ou le travail. Pour les citoyens, c’est une autre chanson. Les fonds de ce plan sont conditionnés à la reprise des recommandations adressées aux États membres ces dernières années: «maîtriser les dépenses publiques», «réformer le système des retraites pour uniformiser les règles des différents régimes», «réduire les dépenses dans tous les sous-secteurs des administrations». Autrement dit, ne pas embaucher d’infirmières, de soignants ou d’enseignants.
L’État français est tenu de «parvenir à des positions budgétaires à moyen terme prudentes et à garantir la soutenabilité de la dette.»
Pour être bien compris, un quotidien d’outre-Rhin vient de révéler les exigences de la Commission vis-à-vis de l’Allemagne, en accord avec ses dirigeants: une réforme pour «améliorer le système des retraites et la suppression de la fiscalité qui décourage de travailler plus d’heures». Et, la froide Commission d’expliquer pourquoi elle parle ainsi à l’Allemagne dont Mme von der Leyen était ministre il n’y a pas si longtemps: «Si l’Allemagne ne mène pas de réformes, les autres États ne voudront pas le faire non plus.» Où est l’intérêt général ici? Nulle part. Seule compte pour Mme von der Leyen et son collège des commissaires la froideur des traités pour servir Sa Majesté le capital.
Patrick Le Hyaric
L’Humanité-Dimanche – 745
Source : Assawra
https://assawra.blogspot.com/…