Ahmed Bensaada
Des milliers de lobbyistes arpentent les couloirs des différentes institutions de l’Union européenne, s’affairant à défendre les intérêts des milieux d’affaire, mais aussi ceux d’organismes œuvrant dans les domaines des « Droits de l’Homme » et de la « l’exportation de la démocratie ».
Par définition, les lobbys sont des groupes d’influence, de pression ou d’intérêts qui ont pour fonction d’influencer les décisions des femmes ou hommes politiques.
Comme on peut s’y attendre, ce « travail » ne peut pas se faire sans dérive. Une récente enquête portant sur les rapports financiers d’une de ces institutions a en effet montré comment elle était fortement infiltrée financièrement par certaines ONG influentes. Celle qui a le plus attiré l’attention est très certainement l’Open Society Foundations (OSF) du milliardaire américain (d’origine hongroise), George Soros. Cette fondation avait aussi défrayé la chronique en publiant une liste de ses « alliés fiables » au Parlement européen (2014-2019). Dans un article publié en 2017 par RT, on pouvait lire : « Sous forme de répertoire, la fondation de George Soros recense en effet les décideurs, députés et dirigeants européens en fonction de leur adhésion aux idéaux de la « société ouverte » (Open Society)[…]. Ce document recense 226 parlementaires (sur 751) considérés comme susceptibles de soutenir les valeurs de la « société ouverte » prônées par G. Soros et sa richissime fondation.
Parmi ses différentes activités, l’OSF s’implique activement dans la promotion de la démocratie. Dans ce domaine, elle travaille de concert avec de nombreuses organisations américaines spécialisées dans l’« exportation » de la démocratie comme la National Endowment for Democracy (NED), la United States for International Development (USAID) et Freedom House.
Il est de notoriété publique que l’OSF de G. Soros a été très impliquée, avec ces organisations, dans les révolutions colorées et le « printemps » arabe.
Cela explique pourquoi elles sont considérées comme indésirables dans de nombreux pays, particulièrement en Russie.
Mais que vient faire l’Algérie dans tout cela?
En fait, jeudi dernier, la blogosphère a servi de boite à écho à une nouvelle intéressante : une résolution du Parlement européen contre l’Algérie. Encore une autre, vous allez me dire. Non, celle-là n’était pas uniquement intéressante par ses menaces à peine voilées, on en a eu l’habitude avec d’autres pays « colorés » ou « printanisés ».
Ce qui attire l’attention, ce sont les seize organismes signataires de la déclaration commune (en trois langues) qui a été largement diffusée dans les médias sociaux à la suite de l’adoption de la résolution. Les voici :
- Human Rights Watch
- Amnesty International
- Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH)
- Reporters Sans Frontières (RSF)
- CIVICUS : Alliance mondiale pour la participation citoyenne
- Article 19
- EuroMed Droits
- Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH)
- Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA)
- Syndicat National Autonome des Personnels de l’Administration Publique (SNAPAP)
- Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA)
- Action pour le Changement et la Démocratie en Algérie (ACDA)
- Riposte Internationale
- Forum de solidarité euro-méditerranéen (FORSEM)
- Institut du Caire pour les études des droits de l’homme (CIHRS)
- Cartooning for Peace
De prime abord, cette liste semble très hétéroclite. Que viennent faire, par exemple, un institut cairote et une ONG sud-africaine (CIVICUS) dans les affaires politiques algériennes? Pourquoi pas un organisme du Bhoutan ou du Bélize?
Pour répondre à cette question, intéressons-nous à chacun de ces seize organismes et les liens qui les unissent.
Commençons par les sept premiers de la liste. Ils ont tous un statut de lobbyiste auprès de l’Union européenne et sont tous financés par l’OSF de Soros (elle-même lobbyiste).
À noter que Article 19 sont aussi financés par la NED. La palme du financement « démocratique » revient certainement à Article 19 qui reçoit aussi des subventions de Freedom House et l’USAID en plus de celles du Département d’État américain.
Très actives dans le Hirak, les cinq organisations suivantes (8 à 13) sont toutes algériennes. La LADDH et le CFDA sont (ou ont été) financés par la NED.
D’autre part, les organisations syndicales SNAPAP et CGATA sont dirigés par un activiste dont les accointances avec la centrale syndicale américaine AFL-CIO (Solidarity Center) sont connues, comme peuvent en témoigner ces deux lettres.
Rappelons que le Solidarity Center est un des quatre satellites de la NED tout comme le National Democratic Institute (NDI), l’International Republican Institute (IRI), et le Center for International Private Enterprise (CIPE).
Il est important de souligner que le NDI et l’AFL-CIO sont eux-aussi des lobbyistes à l’Union européenne.
Une autre information intéressante : La LADDH, le CFDA et le SNAPAP sont tous les trois membres réguliers d’EuroMed Droits.
L’ACDA et Riposte internationale sont des ONG très impliquées dans les rassemblements du Hirak qui se déroulent sur la place de la République à Paris.
Les relations de l’ACDA avec des ONG algériennes financées par la NED comme, par exemple, le Rassemblement Actions Jeunesse (RAJ) ou le CFDA ne sont plus à démontrer.
En septembre dernier, Riposte internationale a déposé un rapport sur « les violations des libertés en Algérie » auprès du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme. Son président qui se déclare comme « un des principaux initiateurs du Mouvement Culturel Berbère (MCB) » est très présent sur Al Magharibia, la chaîne TV des militants de l’ex-FIS (Front Islamique du Salut).
Selon les informations qui figurent sur leur site, le Forum de solidarité euro-méditerranéen (FORSEM) « est fondé par des militants associatifs et des universitaires solidaires des soulèvements populaires dont certains pays de la rive sud de la méditerranée sont le théâtre depuis fin 2010 ». Parmi les membres du Comité scientifique de ce Forum, on retrouve le sociologue algérien Lahouari Addi qui a déclaré en être le cofondateur. Est-il utile de préciser que ce sociologue a été membre, pendant de nombreuses années, de l’« International Forum for Democratic Studies Research Council », le think tank de la NED?
Tout comme les trois ONG algériennes citées précédemment, l’Institut du Caire pour les études des droits de l’homme (CIHRS) est aussi associé à EuroMed Droits comme « membre régional ». Il est financé par la NED et collabore régulièrement avec l’Open Society Foundations.
Lorsque le directeur et co-fondateur du CIHRS fut condamné par contumace en août dernier par un tribunal égyptien dédié aux « affaires terroristes », un appel à la solidarité a été émis par la FIDH. Il a été signé par la LADDH, le CFDA, le SNAPAP, la CGATA, l’ACDA, Riposte internationale, HRW, Amnesty International, la FIDH, CIVICUS, EuroMed Droits, soit onze des seize organismes qui ont applaudi la résolution du Parlement européen contre l’Algérie.
Solidarité financière, quand tu nous tiens!
En plus de ces signataires, on pouvait lire d’autres illustres noms : Issandr Amrani, directeur régional du programme MENA de l’OSF, Carl Gershman, président de la NED, Jeffrey Feltman, ancien sous-secrétaire d’État américain pour les affaires du Proche-Orient ainsi que quelques rescapés du Conseil National Syrien (CNS) comme Basma Kodmani et Radwan Ziadeh, bien connus de la NED.
Le seizième organisme de notre liste est supposé faire la paix avec le rire. Il s’agit de Cartooning for Peace qui s’avère avoir une mission politique en Algérie. Cofondé par Plantu, le caricaturiste du journal Le Monde, Cartooning for Peace regroupe des dessinateurs de presse algériens, tels Dilem ou Le Hic. Le rôle de ces derniers dans le Hirak n’est pas tellement différent des ONG algériennes dont il a été question auparavant. D’ailleurs, un article détaillé leur a été consacré.
Il ne faut pas oublier aussi que Le Monde collabore, lui aussi, avec une des fondations Soros par l’intermédiaire de l’OSIWA (Open Society Initiative for West Africa).
Nous n’allons pas clore cette partie sans évoquer le nom de Mme Maria Arena, la Présidente de la Sous-commission des Droits de l’Homme du Parlement européen qui a été si loquace sur la situation en Algérie tout en encensant un des « ténors autoproclamés du Hirak » en la personne de M. Karim Tabbou. Il faut savoir que cette députée européenne fait partie des 226 parlementaires européens figurant dans la liste des « alliés fiables » de George Soros!
En ce qui concerne la résolution elle-même, on ne peut que s’étonner de la longueur du chapelet d’injonctions qui y figure. Mais il faut se rendre à l’évidence : cette résolution n’aurait jamais pu être écrite sans la complicité et l’étroite coopération avec des ONG algériennes délictueuses.
Il est donc logique de conclure que les ONG algériennes citées dans cet article, qui sont directement ou indirectement reliées à l’administration américaine ont collaboré avec des organismes internationaux dont les fonds de commerce sont les « Droits de l’Homme » ou l’« exportation de la démocratie ». Ces organismes financés par l’OSF constituent une équipe de lobbying extrêmement efficace non seulement auprès du Parlement européen, mais aussi auprès de toutes les institutions européennes et internationales.
Cette résolution est donc par essence un travail de lobbying contre les intérêts de notre pays avec, malheureusement, la participation de certains de nos compatriotes.
Et contrairement à ce que pense M. Karim Tabbou et ses séides, la résolution du Parlement européen et la déclaration du Président Macron sont toutes les deux des ingérences caractérisées et inadmissibles dans les affaires nationales algériennes.
En politique, il n’y a que des intérêts et M. Macron et Mme Arena n’œuvrent que pour ceux de leurs pays. Par contre, en ce qui nous concerne, la terre de notre pays circule dans nos veines.
Et toute cette hyperactivité politique étrangère qui assaille notre patrie de tout bord, dont le Parlement européen n’est qu’un acteur parmi tant d’autres, n’a qu’un seul but : la « printanisation » de l’Algérie.
Source : Ahmed Bensaada
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