Luc Michel

Lundi 23 novembre 2020

LUC MICHEL (ЛЮК МИШЕЛЬ) & EODE/
Luc MICHEL pour EODE/
Quotidien géopolitique – Geopolitical Daily/
2020 11 10/
(Série III/2020-1277)

« L’Éthiopie et l’Érythrée n’affichent pas la volonté de tomber dans le piège tendu par l’Occident. Ce qui montre une volonté de continuer de tenir tête aux Occidentaux »
– Press TV (ce 18 novembre).

Opérations militaires au Tigré: Le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, a lancé une intervention militaire dans la région du Tigré, qui menace de sécession et l’Ethiopie tente de rassurer face aux inquiétudes croissantes, au moment où la presse internationale évoque « un risque d’internationalisation ». Mais qui est ciblé dans ce conflit, une crise politique régionale, devenu guerre de sécession ?

I- LA RADICALISATION DE LA CRISE DU TIGRE : UN ETAT D’URGENCE DEVENU ETAT DE GUERRE

L’armée éthiopienne a donc lancé dans la région dissidente du Tigré (Nord) une « opération de maintien de l’ordre », avait indiqué aux premiers jours le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed (1), atténuant la rhétorique guerrière utilisée par les deux camps, sur fond d’inquiétudes que le conflit devienne hors de contrôle. Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est dit immédiatement « profondément alarmé par la situation » au Tigré, soulignant que « la stabilité de l’Ethiopie est importante pour l’ensemble de la Corne de l’Afrique ».

Au terme de l’état d’urgence proclamé, les forces de sécurité ont notamment autorité pour « désarmer les forces de sécurité de l’Etat régional », a affirmé Abiy Ahmed. S’exprimant à la télévision dans la langue du Tigré, il avait annoncé des « frappes aériennes » qui ne viseront « pas les civils, mais des cibles appartenant à ce groupe dangereux » qu’est le TPLF selon lui. Une source diplomatique avait affirmé à l’AFP avoir reçu des informations crédibles sur au moins une frappe aérienne dès les premiers jours près de la principale ville du Tigré, Mekele. Abiy Ahmed avait auparavant assuré sur Twitter que « les opérations (…) en cours dans le Nord de l’Ethiopie ont des objectifs clairs, limités et réalisables: rétablir l’Etat de droit et l’ordre constitutionnel, et protéger les droits des Ethiopiens à vivre paisiblement où qu’ils soient dans le pays ». Dans son communiqué, M. Abiy affirme avoir été contraint de répondre à « la belligérance incessante de la clique du TPLF ».

Aucune information officielle n’est disponible sur les opérations en cours. La coupure des réseaux internet et téléphoniques au Tigré rendent extrêmement difficile de vérifier la situation sur place. Des sources diplomatiques ont fait état d’activités militaires sur les principaux axes reliant le Tigré à la région frontalière Amhara, signalant des combats intenses et des tirs d’artillerie sur la route menant à Humera, aux confins du Soudan et de l’Erythrée. Des mouvements de troupes sont aussi signalés dans la région Afar, également voisine du Tigré.

LA CRAINTE D’UN LONG CONFLIT DEVASTATEUR ? 

Les récentes escalades militaire et verbale font désormais « craindre un long conflit dévastateur, susceptible de menacer la stabilité déjà fragile du deuxième pays le plus peuplé du continent avec plus de 100 millions d’habitants ». L’International Crisis Group (ICG, réseaux Sorös, au cœur de la déstabilisation américaine en Afrique) (2) a « averti » dès les premiers combats que si « elle n’est pas rapidement arrêtée, l’actuelle confrontation armée (…) sera dévastatrice, non seulement pour l’Ethiopie, mais pour la Corne de l’Afrique toute entière ». L’ICG rappelle que les autorités du Tigré peuvent compter sur « une importante force paramilitaire et une milice bien entraînée, dont les effectifs combinés sont estimés à 250.000 hommes » et « semblent bénéficier d’un soutien significatif des six millions de Tigréens » (ajoute avec jubilation l’ICG). 

ABIY AHMED LIMOGE LE CHEF DE L’ARMEE, APRES AVOIR LANCE SON OFFENSIVE CONTRE LE TIGRE

Après avoir lancé son opération militaire dans la région du Tigré, le Premier ministre éthiopien, qui est rappelons le un général, Abiy Ahmed, a limogé ce 8 novembre le chef de l’armée. Ce changement intervient dans un contexte d’escalade des tensions entre le Tigré et le pouvoir central, menaçant fortement la stabilité déjà fragile de l’Éthiopie. Quatre jours après le lancement de son offensive militaire contre la région du Tigré, dans le nord du pays, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a limogé le chef de l’armée, le général Adem Mohammed, a annoncé son secrétariat. Le chef adjoint de l’armée, le général Berhanu Jula, « a été promu au rang de chef de l’armée », affirme un communiqué du bureau du Premier ministre, sans préciser les raisons du limogeage de son prédécesseur.

Ce changement à la tête des forces armées éthiopiennes intervient alors que le gouvernement a lancé ce 4 novembre une opération militaire contre la région du Tigré, accusée par Addis Abeba de velléités sécessionnistes.

Malgré un black-out total sur les opérations militaires, sur le terrain apparaissent les premiers signes de combats qui semblent assez nourris entre forces armées éthiopiennes et tigréennes. Une centaine de soldats éthiopiens ont ainsi été admis pour des blessures « par balles » dans un hôpital de la région Amhara, qui jouxte le Tigré, a indiqué ce 8 novembre à l’AFP un médecin local. À l’hôpital de Sanja, au nord de Gondar, à une soixantaine de kilomètres du Tigré, « nous avons eu 98 cas, tous de l’armée nationale », a assuré ce médecin sous couvert d’anonymat, sans préciser les dates des admissions des soldats blessés. Le médecin a souligné qu’il n’avait enregistré aucun décès, mais que des blessés plus graves avaient été dirigés vers des hôpitaux plus importants, à Gondar et ailleurs. Sur la route menant de Gondar au Tigré, les correspondants de l’AFP ont pu noter une circulation fréquente d’ambulances transportant des blessés. 

UNE FRAPPE AERIENNE A VISE MEKELE, LA CAPITALE DU TIGRE 

Par ailleurs, selon un avis d’information des Nations unies diffusé le 8 novembre dernier, « une frappe aérienne a visé Mekele », la capitale du Tigré, à proximité de l’aéroport. « Une seule explosion a été notée, ainsi qu’une riposte venue du sol », ajoute le rapport des Nations unies. Un responsable des Nations unies a indiqué samedi à l’AFP sous couvert d’anonymat que, selon un rapport interne, les forces armées tigréennes tenaient le quartier général de l’armée éthiopienne à Makele. La base militaire de Makele est une des plus importantes d’Éthiopie, héritage des années de guerre avec l’Érythrée, qui borde le Tigré. Un média public éthiopien a également cité dimanche le général Berhanu Jula affirmant que les forces fédérales avaient « totalement détruit les armes lourdes de la clique de traîtres », en référence au Front de libération des Peuples du Tigré (TPLF), qui a, durant près de trente ans et jusqu’à l’avènement d’Abiy Ahmed en 2018, dominé les structures de pouvoir en Éthiopie.

QUATRE VILLAGES DU TIGRE « CAPTURES », SELON LE CHEF DE L’ARMEE

Promu ce 8 novembre chef de l’armée, l’officier supérieur a ajouté que les soldats éthiopiens  avaient « complètement capturé » quatre villages de l’ouest du Tigré où se sont concentrés les combats. Diverses sources diplomatiques et humanitaires ont également fait état d’activités militaires sur les principaux axes reliant le Tigré à la région Amhara et signalé des combats et des tirs d’artillerie sur la route menant à Humera, aux confins du Soudan et de l’Érythrée, dans l’ouest du Tigré.

Le parlement éthiopien avait révoqué le parlement régional et le gouvernement du Tigré, qui avait rétorqué en qualifiant cette mesure de « plaisanterie » et en accusant le Premier ministre de vouloir installer des « marionnettes » dans la région. Prix Nobel de la paix en 2019 (ce qu’on lui reproche désormais ad nauseum) notamment pour avoir mis fin à l’état de guerre avec l’Érythrée, Abiy Ahmed, devenu la bête noire des USA depuis qu’il s’est rapproché de Pékin et de Moscou, avait annoncé le lancement de ces opérations militaires au Tigré en représailles à l’attaque de bases militaires éthiopiennes sur place. 

UNE ESCALADE REGIONALE 

La tension entre Addis Abeba et le Tigré – dont les dirigeants s’estiment marginalisés par le nouveau pouvoir – s’était particulièrement accrue depuis l’organisation en septembre d’élections régionales non reconnues par le pouvoir central. L’escalade militaire fait donc « craindre un conflit susceptible de menacer la stabilité déjà fragile du deuxième pays le plus peuplé du continent avec plus de 100 millions d’habitants et, au-delà, de toute la Corne de l’Afrique ».

L’armée aurait « libéré » l’ouest du Tigré, selon le Premier ministre Abiy Ahmed. Des membres de la milice régionale Amhara combattent aux côtés des forces fédérales contre les séparatistes du Tigré, notamment dans la ville de Gondar. Le Premier ministre éthiopien a assuré « que l’armée avait vaincu les forces séparatistes dans l’ouest du Tigré ». Les combats ont déjà poussé plus de 11 000 Éthiopiens à se réfugier ces dernières 48 heures dans l’est du Soudan. L’armée fédérale aurait gagné du terrain. Le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, a affirmé, le 12 novembre dernier, que « l’armée avait vaincu les forces séparatistes dans l’ouest du Tigré », accusant ces dernières « de s’être livrées à des atrocités ». « La région occidentale du Tigré a été libérée », écrivait-il sur Twitter. « Dans ces zones libérées, l’armée apporte à présent une assistance et des services humanitaires. Elle nourrit aussi la population », ajoute-t-il. Les communications étant coupées et les médias interdits de séjour dans le Tigré, il n’a pas été possible de vérifier ces affirmations, et le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) n’a fait pour l’heure aucun commentaire.

Les combats et les frappes aériennes dans cette région du nord de l’Éthiopie, frontalière de l’Érythrée et du Soudan, ont déjà fait des centaines de morts et poussé des milliers de personnes à se réfugier au Soudan depuis le début du mois. Ils ont aussi ravivé les divisions ethniques du pays et soulevé des questions sur Abiy Ahmed. 

LES BASES DU CONFLIT DU TIGRE 

À 44 ans, le plus jeune dirigeant africain a reçu l’an dernier le prix Nobel de la paix pour avoir contribué au règlement du conflit avec l’Érythrée. Abiy Ahmed accuse le TPLF d’avoir enclenché les hostilités en attaquant une base de l’armée fédérale et en défiant son autorité. De leur côté, les Tigréens dénoncent « l’oppression et les discriminations » dont ils se disent victimes.

L’État du Tigré compte quelque 5 millions d’habitants, et la situation humanitaire était déjà difficile avant le conflit, quelque 600.000 personnes dépendant d’une aide alimentaire. Ann Encontre, représentante de l’agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR) en Éthiopie, a déclaré à Reuters que des discussions étaient en cours avec les deux parties pour obtenir l’ouverture de « couloirs humanitaires ». 

Le Parlement éthiopien a par ailleurs levé l’immunité parlementaire d’une quarantaine de ses membres, dont le président de l’exécutif régional du Tigré, Debretsion Gebremichael. Quelque 150 personnes soupçonnées de préparer pour le compte du TPLF des « attaques terroristes » ont été arrêtées à Addis Abeba et dans d’autres lieux du pays, a annoncé pour sa part la cellule de crise « état d’urgence » créée récemment par le gouvernement.

LE PRETEXTE D’UNE CRISE HUMANITAIRE

« Les combats auraient déjà poussé plus de 11.000 Éthiopiens à se réfugier ces dernières 48 heures dans l’est du Soudan, frontalier du Tigré », a déclaré Alsir Khaled, directeur de l’agence soudanaise pour les réfugiés dans la ville frontalière de Kassala. Une source gouvernementale soudanaise a confié à l’agence soudanaise Suna que « jusqu’à 200 000 Éthiopiens pourraient se réfugier au Soudan ». Recevant le ministre érythréen des Affaires étrangères, Osman Saleh, le Premier ministre soudanais Abdallah Hamdok a insisté mercredi sur « la nécessité d’arrêter dès que possible les combats en Éthiopie et de revenir à des négociations pour éviter les guerres », d’après Suna.

II-
QUI A INTERET A UNE INTERNATIONALISATION DU CONFLIT ?

Suite aux conflits en Éthiopie entre Addis-Abeba et la région du Tigré, l’ambassadeur d’Éthiopie en France, Henok Teferra Shawl, dénonce « une tentative du TPLF d’internationaliser le conflit » après les récents tirs sur l’Érythrée. Désormais encerclées depuis la chute de la ville d’Humera, à la frontière avec le Soudan, les troupes du TPLF semblent perdre du terrain face aux renforts envoyés au Nord par le Premier ministre, Abiy Ahmed. Au point de jouer leur va-tout, en tentant d’entraîner l’Érythrée voisine dans une guerre interne à l’Éthiopie ? 

ENTRAINER L’ÉRYTHREE VOISINE DANS UNE GUERRE INTERNE A L’ÉTHIOPIE ?

C’est l’avis d’Henok Teferra Shawl, l’ambassadeur d’Éthiopie à Paris, qui estime que « la fédération éthiopienne sortira renforcée de ce conflit ». Abiy Ahmed et son ambassadeur ont parfaitement raison de dire que « le parti agissant dans l’ombre des rebelles du Tigré a l’intention d’internationaliser le conflit ».

Ce qu’ils n’ont pas dit clairement c’est l’identité de ces parties ? Le rapport direct entre les rebelles du Tigré et Israël n’étant plus un secret, pas plus que l’hostilité des USA envers Abyi Ahmed. Il va sans dire que l’Éthiopie ne saura pas facilement contrer cette crise sans l’appui fiable. En effet, au Tigré et pendant plusieurs siècles, les juifs éthiopiens, les falashas (3), ont principalement été installés dans la province du Gondar et, à moindre mesure, dans celle du Tigré où ils bénéficient de petits États indépendants.

DJIBOUTI AVEC L’ETHIOPIE :
« SOUTIEN INDEFECTIBLE ET SANS FAILLE » A ABIY AHMED.

L’appui fiable dont l’Éthiopie cherche vient en premier lieu des pays africains eux-mêmes et Djibouti a répondu présent. Aucune ambiguïté sur la question du Tigré : la diplomatie djiboutienne considère le Premier ministre éthiopien comme « le seul garant de l’unité et de l’intégrité du territoire ». Une source gouvernementale parle même de soutien « indéfectible et sans faille » à Abiy Ahmed.

L’importance de ce soutien est qu’en effet Djibouti lui-même entretient d’étroites relations avec la Chine et qu’en cas d’un débordement incontrôlable dans la Corne de l’Afrique, il se pourrait que la Chine s’y intéresse. Après tout, l’annonce de l’ouverture d’une première base au Soudan pourrait aussi renvoyer à ce même contexte.

Abiy Ahmed primé par le Nobel et donc par les Occidentaux devrait peut-être revoir la nature de ses relations avec les pays qui par Israël interposés ont réussi à faire le remake de la guerre civile au Soudan des années 2010.

ABIY AHMED PAIE SES RELATIONS AVEC LES PUISSANCES DE L’EST 

On sait aussi que Abiy Ahmed « paie son obstination de ne pas renoncer à ses relations avec les puissances de l’est » (4), commente Farsi. Abiy Ahmed a en effet « déçu le camp occidental dans plusieurs secteurs » : il s’est rapproché substantiellement de la Chine lui demandant aide et assistance, dans le cadre de la lutte contre le Covid-19, tout en refusant une médiation américaine dans le dossier hautement stratégique du barrage du Nil.

« Il est temps que les relations Éthiopie-axe de l’Est deviennent plus solide et prennent un aspect militaire, sinon, ce genre de scénario hybride ne serait pas être contré », commente fort justement Press TV. 

DERRIERE LES SEPARATISTES QUI MENACENT L’ÉRYTHREE : L’OCCIDENT NE VEUT PAS QUE MOSCOU SE REIMPLANTE DANS LA CORNE DE L’AFRIQUE

En Éthiopie, les exactions occidentales ne s’arrêtent pas là. Après les nombreux échecs des États-Unis pour faire plier le Premier ministre, Abiy Ahmed, et saper ses ambitions de développement du pays en se détachant de l’Occident, la situation prend une tout autre dimension. Le conflit migre maintenant vers l’Érythrée. Certes, l’Occident tente non seulement de déstabiliser l’Éthiopie, mais visiblement l’Érythrée est aussi devenue une cible (5).

« La minorité séparatiste dans la région du Tigré a revendiqué des tirs de roquettes qui ont frappé la capitale de l’Érythrée frontalière », accusant à nouveau « l’armée d’Asmara d’aider l’armée éthiopienne ». « Les forces éthiopiennes utilisent-elles aussi l’aéroport d’Asmara » pour faire décoller les avions qui bombardent le Tigré, ce qui en fait « une cible légitime », a déclaré Debretsion Gebremichael, accusant en outre une nouvelle fois « l’armée érythréenne d’être engagée dans des combats au sol au Tigré », région du nord de l’Éthiopie.

Plusieurs roquettes ont frappé samedi les abords de l’aéroport d’Asmara, ont indiqué dans la nuit deux diplomates basés à Addis-Abeba, sans pouvoir faire état d’un bilan humain ou d’éventuels dégâts. Les autorités érythréennes n’ont pas réagi dans l’immédiat.

Auparavant, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Gutteres, vieux complice des occidentaux, avait déjà fait exhorté d’une certaine manière le Premier ministre Abiy Ahmed de se plier (sic) et d’arrêter les tentatives de stopper les séparatistes tigréens (resic), sous peine de voir que « le conflit national allait se transformer en un conflit régional déstabilisant la Corne de l’Afrique ».

Cette minorité, financée depuis l’extérieur, tente maintenant d’impliquer l’Érythrée dans ce conflit en tentant éventuellement de rallier Asmara à sa cause et saper ainsi l’accord de paix signé entre le président Érythréen, Isaias Afwerki et le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed. 

LA MER ROUGE : UN LIEU TRES STRATEGIQUE
OU MOSCOU S’IMPLANTE

Maintenant, plusieurs acteurs, en dehors de l’Occident, pourraient s’ingérer dans ce conflit. Étant donné que l’Érythrée longe la mer Rouge, qui reste un lieu très stratégique (6), et que la Russie a signé un accord de projet portuaire en septembre 2018, Moscou s’apprête maintenant d’installer une base militaire sur les rives de la mer Rouge comme à l’époque soviétique.

La mer Rouge est sur l’une des routes les plus sensibles du commerce mondial, car près de 10 % des marchandises du monde entier passent par elle. La mer relie les producteurs d’énergie du golfe Persique, les marchés occidentaux et les industries d’exportation de l’Asie du Nord-Est, ce qui fait des points d’accès à cette mer un objet de convoitise des grandes puissances environnantes. Elle a attiré encore davantage l’attention à l’étranger, dans la mesure où sa stabilité s’est détériorée en raison de la proximité de la guerre au Yémen, lancée par l’Arabie saoudite et de l’augmentation de la piraterie basée en Somalie afin de permettre aux forces navales occidentales de s’implanter dans ces eaux. Par conséquent, plusieurs pays ont déployé leurs forces militaires dans la région, notamment à Djibouti, près du détroit de Bab El-Mandeb. La Russie avait aussi la volonté de s’implanter militairement à Djibouti, mais suite aux pressions de Washington, les accords n’ont pas été conclus.

LE SOUDAN IMPLIQUE ? 

Moscou a trouvé d’autres hôtes potentiels en mer Rouge, le plus accueillant était le Soudan. En novembre 2017, l’ancien président du Soudan, Omar El-Béchir s’était rendu à Sotchi pour rencontrer son homologue russe, avec un programme visant à approfondir la coopération dans plusieurs domaines, dont la sécurité et la défense. Même si la possibilité d’établir une base militaire ne figurait pas parmi les documents signés par Poutine et El-Béchir, ce sujet a été discuté par eux lors de la réunion. Khartoum avait souhaité cet engagement renforcé en raison de l’effondrement des relations avec Washington dans la fin du Régime El béchir.

Les résultats des accords de sécurité sont devenus tangibles, avec le dévoilement d’un accord pour l’utilisation des installations navales de Port-Soudan par la flotte russe en mai 2019. Jusqu’à présent, cet accord constitue notamment le plus grand succès de la Russie en matière d’installation militaire sur la mer Rouge.

Suite à la volonté de Moscou d’établir une présence militaire permanente au Soudan, le pays a subi une révolution de couleur lancée par Washington et les réseaux américains de l’Atlantic Council afin de renverser Omar El-Béchir et de saper par la même occasion une montée de l’influence russe dans le pays.

L’ERYTHREE ALLIEE DE MOSCOU

C’est alors que suite aux accords de paix signés entre l’Éthiopie et l’Érythrée en juin 2018 (7) et la levée des sanctions de l’ONU, Asmara a décidé de faire venir la Russie et non l’Occident. En août de cette année-là, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a officiellement annoncé que l’Érythrée et la Russie ont négocié l’ouverture d’une base « logistique » sur la côte érythréenne.

Ce qui fait que l’expansion du conflit éthiopien vise a saper entièrement le développement de la région mais surtout, elle vise à barrer la route à l’influence russe dans cette région. 

Asmara n’a pour le moment émis aucun commentaire suite aux attaques de cette minorité séparatiste basée dans la région du Tigré, ce qui montre, qu’il n’est pas décidé à tomber dans le piège tendu par l’Occident, à savoir, impliquer militairement l’Érythrée dans le conflit éthiopien. 

« L’Éthiopie et l’Érythrée n’affichent pas la volonté de tomber dans le piège tendu par l’Occident. Ce qui montre une volonté de continuer de tenir tête aux Occidentaux », commente Press TV. 

NOTES ET RENVOIS :

(1) Cfr. sur LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
DESTABILISATION DE L’ETHIOPIE (GEOPOLITIQUE AFRICAINE) (III): LA SECESSION DU TIGRÉ POUR DÉMEMBRER LE PAYS ?
sur http://www.lucmichel.net/2020/11/09/luc-michels-geopolitical-daily-destabilisation-de-lethiopie-geopolitique-africaine-iii-la-secession-du-tigre-pour-demembrer-le-pays/

(2) Lire sur PANAFRICOM/ ENQUETES SUR LA DESTABILISATION DE L’AFRIQUE (IV) : LES BUTS DE L’ACTION DE DESTABILISATION DE L’ « INTERNATIONAL CRISIS GROUP » (RESEAUX SORÖS) AU CAMEROUN
sur http://www.panafricom-tv.com/2017/09/06/panafricom-enquetes-sur-la-destabilisation-de-lafrique-iv-les-buts-de-laction-de-destabilisation-de-l-international-crisis-group-reseaux-soros-au-came/

(3) Les Juifs éthiopiens (ou Beta Israel, la « maison d’Israël » au sens de la « famille d’Israël ») sont des Éthiopiens de religion juive ou leurs descendants qui ont pour la plupart émigré en Israël. Selon leurs traditions, ils descendent de la tribu de Dan. Ils ont vécu pendant des siècles au nord de l’Éthiopie (Gondar, Tigré), où ils ont constitué des États indépendants, qui ont été détruits au XVIIe siècle par le pouvoir impérial. Ils deviennent alors une minorité marginalisée, le plus souvent sans droit de posséder des terres et, à l’occasion, accusée d’avoir le « mauvais œil ». Beta Israel est le nom qu’ils se donnaient lorsqu’ils vivaient en Éthiopie. Le nom Falacha (amharique : « exilé », « errant », « sans terre »), couramment utilisé pour les désigner en Europe, est rejeté par les Juifs éthiopiens qui le considèrent péjoratif. Depuis l’immigration en Israël, le terme Beta Israel tend à y être remplacé, y compris au sein de la communauté elle-même, par l’expression Juifs éthiopiens ou Etiopim (« Éthiopiens »). Ils n’avaient pas de relations avec le judaïsme européen lorsque celui-ci est entré en contact avec eux à la fin du XIXe siècle. Mais ils se sont alors immédiatement identifiés à l’ensemble du monde juif et, désireux de l’intégrer, ils réduisent progressivement leurs particularismes religieux pour rapprocher leurs rites de ceux du judaïsme orthodoxe.
Le gouvernement d’Israël reconnaît leur judaïté en 1975. À partir de 1977, sur décision du gouvernement Begin, la plupart des Beta Israel émigrent en Israël. Leur exode s’opère dans des conditions difficiles et grâce à un pont aérien. Leur intégration en Israël pose moins de problèmes, quoique malaisée au vu de la différence entre les cultures. N’ayant pour la plupart pas bénéficié d’une éducation à l’occidentale, ils sont en butte à diverses discriminations qui les mènent à manifester à plusieurs reprises dans les premières décennies du XXie siècle. Les conditions économiques dont ils jouissent sont cependant meilleures qu’en Éthiopie et mènent les Falash Mura, descendants de Beta Israel qui avaient adopté le christianisme et été par conséquent exclus du groupe, à revendiquer une origine ou un statut de Juif. Celui-ci leur a généralement été reconnu et ils sont venus rejoindre les rangs de la population qui comptait environ 110 000 personnes en 20096 en Israël, et environ 138 200 en 20142.

(4) Cfr. sur LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
FLASH VIDEO/ L’ÉTHIOPIE FAIT BOUGER LES LIGNES GEOPOLITIQUES (GEOPOLITIQUE DE L’AFRIQUE DE L’EST III)
sur http://www.lucmichel.net/2018/08/23/luc-michels-geopolitical-daily-flash-video-lethiopie-fait-bouger-les-lignes-geopolitiques-geopolitique-de-lafrique-de-lest-iii/
Et sur :
LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
FLASH VIDEO/ OU VA ADDIS-ABEBA ? L’ETHIOPIE AU CŒUR DU GRAND JEU GEOPOLITIQUE EN AFRIQUE DE L’EST
sur http://www.eode.org/luc-michels-geopolitical-daily-flash-video-ou-va-addis-abeba-lethiopie-au-coeur-du-grand-jeu-geopolitique-en-afrique-de-lest/

(5) Cfr sur LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY
LA PACIFICATION ENTRE L’ETHIOPIE ET L’ERYTHRÉE
sur http://www.palestine-solidarite.org/analyses.luc_michel.190718.htm

(6) Cfr. sur LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
GEOPOLITIQUE AFRICAINE : L’EQUILIBRE DES FORCES EST-IL EN TRAIN DE CHANGER EN AFRIQUE DE L’EST ?
sur http://www.eode.org/luc-michels-geopolitical-daily-flash-info-geopolitique-africaine-lequilibre-des-forces-est-il-en-train-de-changer-en-afrique-de-lest/ 

(7) Cfr sur LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY
LA PACIFICATION ENTRE L’ETHIOPIE ET L’ERYTHRÉE
Supra

(Sources : AFP –  France24 – Farsi – Press TV – EODE Think Tank)

LUC MICHEL (ЛЮК МИШЕЛЬ) & EODE 

* Avec le Géopoliticien de l’Axe Eurasie-Afrique :
Géopolitique – Géoéconomie – Géoidéologie – Géohistoire –
Géopolitismes – Néoeurasisme – Néopanafricanisme
(Vu de Moscou et Malabo) :
PAGE SPECIALE Luc MICHEL’s Geopolitical Daily
https://www.facebook.com/LucMICHELgeopoliticalDaily/

* Luc MICHEL (Люк МИШЕЛЬ) :
WEBSITE http://www.lucmichel.net/ 
PAGE OFFICIELLE III – GEOPOLITIQUE
https://www.facebook.com/Pcn.luc.Michel.3.Geopolitique/ 
TWITTER https://twitter.com/LucMichelPCN
LUC-MICHEL-TV https://vimeo.com/lucmicheltv
* EODE :
EODE-TV https://vimeo.com/eodetv
WEBSITE http://www.eode.org/ 
LINKEDIN https://www.linkedin.com/in/luc-michel-eode-600661163/

Source : Luc MICHEL